À 67 ans, Paule Baillargeon s'offre un retour sur les planches. Du 23 avril au 4 mai prochains, elle se glissera dans les mots de la romancière féministe française Annie Ernaux au Théâtre La Chapelle, dans la pièce Empreintes mise en scène par Geneviève L. Blais.

Directrice artistique du Théâtre À corps perdus qu'elle a fondé en 2003, Geneviève L. Blais a un intérêt pour les liens entre le corps et son rapport au monde. Il n'est donc pas surprenant qu'elle se soit intéressée au sujet de l'avortement, le thème central de sa pièce Empreintes.

Basé sur la narration, le texte d'Empreintes provient de témoignages de femmes qui ont eu un avortement et que Geneviève L. Blais a rencontrées. À ces témoignages, s'est ajouté celui de la romancière française Annie Ernaux avec son oeuvre L'événement dans laquelle elle raconte l'avortement qu'elle a vécu dans sa jeunesse, et des éléments tirés du livre Expulsion, écrit par Hélène Delmotte et Luis de Miranda.

Donner voix à Annie Ernaux

Geneviève L. Blais a choisi Paule Baillargeon pour le «rôle» d'Annie Ernaux. «Je cherchais une artiste pour qui la question féminine a été importante et une interprète qui soit lumineuse, dit Geneviève L. Blais. Paule Baillargeon dégage une lumière et une grande humanité et pour porter les mots souvent très durs d'Annie Ernaux, cela prenait quelqu'un de très humain. L'histoire de Paule Baillargeon a aussi beaucoup joué. Sa sensibilité et le niveau esthétique aussi.»

Paule Baillargeon est très heureuse de participer à cette expérience théâtrale. «C'est très surprenant pour moi que des jeunes traitent un sujet comme l'avortement, dit-elle. Ce qu'Annie Ernaux écrit est très dense et très fort. J'ai beaucoup d'admiration pour elle. Elle a connu les broches à tricoter. Ce n'est pas rigolo mais c'est un beau projet.»

Annie Ernaux a accepté que son témoignage fasse partie d'Empreintes à condition que ce soit ses mots à elle. «Il faut que ce soit tel quel, pas une virgule de changée, dit Paule Baillargeon. Moi, j'ai accepté beaucoup pour ça. Pour dire Annie Ernaux. Car ça m'intéresse. Et je suis touchée qu'une jeune femme, Geneviève L. Blais, me l'ai proposé.»

L'écriture d'Empreintes a débuté il y a plusieurs années. «C'a été une longue démarche, assez complexe, dit Geneviève L. Blais. J'étais très attachée aux rencontres que j'ai eues, alors au départ, je ne prenais pas certaines libertés, mais il fallait que j'en arrive à une matière plus malléable pour pouvoir travailler tout en gardant l'essence de ces rencontres. J'ai été aidée par Catherine Léger dans le travail d'écriture.»

La pièce ne sera pas qu'une déclamation de témoignages. Geneviève L. Blais a soigné l'approche scénique et a fait appel à un sculpteur, Jean Briand, pour la scénographie. «Dans cette approche d'un théâtre qui joue un peu à la frontière entre la réalité et la fiction, souvent il y a une approche plus réaliste et donc pour moi, c'est un choc super important entre une parole qui vient du réel et une autre beaucoup plus poétique, plus dans l'impression et dans les sensations.»

Mise à part Paule Baillargeon, six autres comédiennes feront partie de la pièce produite par le Théâtre À corps perdus: Kathleen Aubert, Isabelle Guérard, Nico Lagarde, Maude Laurendeau, Victoria Diamond et Estelle Richard.