Le quatuor du Petit Théâtre du Nord, formé des comédiens Luc Bourgeois, Louise Cardinal, Sébastien Gauthier et Mélanie St-Laurent, jouera cet été dans les ruines du mythique restaurant Le Madrid, démoli l'automne dernier.

C'est, bien sûr, une façon de parler, puisque Les Orphelins de Madrid sera présentée à Blainville, et que sur les cendres du restaurant Madrid, aux abords de l'autoroute 20, on a construit un St-Hubert et un McDonald's...

L'histoire imaginée par Sarah Berthiaume s'inspire d'une anecdote selon laquelle un couple séparé se retrouvait chaque semaine au Madrid, situé entre Montréal et Québec, pour s'échanger les enfants (en garde partagée).

L'auteure du Déluge après est partie de là. Le reste, elle l'a inventé.

Sarah Berthiaume a respecté la seule contrainte imposée par le Petit Théâtre du Nord: écrire une pièce pour les quatre comédiens fondateurs de la troupe, qui forment d'ailleurs des couples dans la vie. L'auteure aime tremper ses récits fantastiques dans la réalité. Dans Villes mortes, on se rappellera que le Dix30 était occupé par des zombies... Ça vous donne une petite idée!

Séparation

Dans Les Orphelins de Madrid, le couple séparé se rend au Madrid, comme à son habitude, mais le resto est démoli, et dans un moment de distraction, leur fille disparaît dans les décombres. «C'est une pièce qui traite de la séparation, mais à la manière d'un film d'action, résume le metteur en scène, Sylvain Bélanger. Qu'est-ce qu'on fait de notre enfant quand on est séparé? Comment l'enfant vit-il cette séparation? Sans faire dans la psychologie, Sarah aborde ces questions, mais d'une façon complètement loufoque.»

Pendant toute la durée de la pièce, les parents se disputeront tout en cherchant leur fille. On y apprendra que le couple est séparé depuis huit mois; que c'est la femme, dans la jeune quarantaine, qui a laissé son mari et qu'elle s'est remise en ménage avec un homme de Québec. D'où le point de chute au Madrid. On présume que l'enfant ne fréquente pas encore l'école...

Ce jour-là, il se passe tout plein de choses bizarres. D'abord, le papa de l'enfant égarée trouve un Zoltar, cette machine avec le buste d'un diseur de bonne aventure enturbanné - qu'on a vue notamment dans le film Big, où Tom Hanks enfant se transforme en adulte. Le papa fait ainsi le voeu de voir sa petite fille devenir une femme pour qu'il puisse lui expliquer les circonstances de sa séparation. Ce qui arrive de fait. Sauf qu'il est le seul à la voir.

Ce Zoltar, une machine qui se trouvait vraiment au Madrid, fait office de personnage. Il entrera d'ailleurs en communication avec chacun des personnages, dont ce serveur de l'établissement qui voudrait que tout soit comme avant. Mais la machine n'exaucera pas son voeu. «C'est une machine qui parle vraiment et qui interagit avec les personnages», indique Sylvain Bélanger, qui a notamment mis en scène L'enclos de l'éléphant, Les mutants et Yellow Moon.

En plein délire

Le pauvre serveur, traumatisé par la destruction de ce haut lieu du kitsch, qui symbolise aussi l'effondrement d'un rêve de famille, se terre dans les ruines en se nourrissant de frites congelées. Il kidnappera un chanteur populaire (dont nous ne révélerons pas le nom), jusqu'à ce qu'il avoue (à l'émission Tout le monde en parle) que c'est lui, l'auteur de ses chansons. Bref, on nage en plein délire.

«On s'est bien sûr inspiré du folklore très riche du Madrid, précise Sylvain Bélanger. Ce qu'il y a de fascinant, c'est que tout le monde a une histoire à raconter à propos du Madrid. Sur scène, on évoque les ruines avec de la garnotte et de la tôle. On aurait aimé avoir des pneus de Big Foot et des dinosaures géants, mais ça n'aurait jamais pu entrer! Au-delà du côté anecdotique, c'est un texte profondément humain sur ce qu'on vit quand on se sépare. C'est un beau pari.»

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Les orphelins de Madrid, du 28 juin au 25 août au Centre communautaire de Blainville.