Après avoir visité l'an 2033 et le milieu du XXe siècle, Sébastien Dodge arrête sa machine à remonter dans le temps au règne de Louis XIV. Sa pièce La guerre se veut une dénonciation épique de la classe dirigeante, sur fond d'intrigues et de massacres...

« J'aime les choses qui sont énormes », avoue Sébastien Dodge. L'aveu paraît curieux dans la bouche d'un comédien qui excelle dans les rôles de composition mesurés, comme cet inquiétant garçon des enfers dans Huis clos, sous la direction de Lorraine Pintal. Mais il est vrai que, lorsqu'il met son chapeau d'auteur, son imagination n'a plus de limites.

Sébastien Dodge a d'ailleurs commencé à écrire pour faire un théâtre qui lui ressemble. « Je ne me reconnaissais pas dans la dramaturgie contemporaine. Le théâtre est trop calqué sur la réalité, juge-t-il. Il est visuel, mais il s'abandonne moins qu'il ne le devrait au langage théâtral. Il faudrait qu'il s'émancipe. »

La guerre, troisième et dernière partie d'une trilogie amorcée à l'Espace Geordie en 2008 avec Suprême Deluxe et poursuivie l'an dernier avec La genèse de la rage, s'intéresse au règne de Louis XIV. L'auteur, qui met lui-même en scène ses pièces, se dit fasciné par cette époque qui est marquée par le souci de « mettre en scène » l'exercice du pouvoir.  

L'image qui vient à l'esprit lorsqu'on songe au Grand Siècle, c'est cet amour des arts par lequel le royaume brille sur l'Europe. L'affection que Louis XIV avait pour l'art de la guerre était toutefois aussi grande. Sébastien Dodge se défend d'être freudien, mais admet s'intéresser à ce qui, dans l'enfance de ce jeune roi souvent menacé, a pu motiver ses actions futures. « Il est intéressant d'explorer la psychologie des tyrans », trouve-t-il.

Tout ça semble bien sérieux. Ce l'est, dans la mesure où le jeune auteur aborde cette époque pour pointer du doigt une élite qui dirige le monde au mépris du bien-être des classes inférieures. Mais il n'est pas dans ses habitudes de se prendre la tête comme, disons, Alexis Martin. Dès les premières répliques, on comprend bien qu'il mise encore sur un humour satirique et outrancier.

« Le mélange des genres est quelque chose d'assez payant », estime le créateur, qui admet volontiers l'influence de RBO sur sa façon d'aborder l'humour. Le spectacle qu'il tire de sa pièce miserait donc sur une « mécanique burlesque » et un « traitement épique du genre film de guerre à la Braveheart ».  

La satire, bien sûr, se prête bien à la critique et à la dénonciation. Mais pour Sébastien Dodge, il y a plus : faire un « spectacle épique avec sept acteurs sans budget ou presque » est pour lui un commentaire sur l'art qui se fait. « J'aime penser que mon théâtre est un pied de nez aux institutions », conclut-il.

Jusqu'au 3 mars à la salle Jean-Claude Germain du Théâtre d'Aujourd'hui.