Ils se nomment Alex, Billy, Jules et Nina. Quatre personnages insolites d'un spectacle exploratoire. Leurs voix s'entremêlent dans des soliloques poético-existentialistes. Il est question de rencontres et de solitudes, d'amours et de ruptures. Deux femmes et deux hommes qui partagent une quête de hauteur. Mais aussi une douleur, une chute, comme si leur soif d'absolu ne parvenait jamais à effacer les blessures anciennes.

Par moments, on évoque un voyage à Cuba et on voit des images de La Havane. On songe à Hubert Aquin: «Cuba coule en flammes au milieu du lac Léman pendant que je descends au fond des choses.» Jules (défendu par Stéphane Poitras) est habillé en boxeur. On ne sait pas trop pourquoi: est-ce une métaphore d'une vie menée comme un combat dans la rue; de la dure et violente réalité urbaine? Il y a aussi Alex (Louis-Karl Tremblay), en éternel conflit avec lui-même, comme il le résume dans un troublant monologue sur ses (mauvais) choix, son mal de vivre.

Un texte hermétique

Bien honnêtement, le critique n'est pas sûr d'avoir tout compris... Or, sans doute, le sens, la clarté du récit et la psychologie sont superfétatoires pour accéder à Leitmotiv, une proposition expérimentale et multidisciplinaire. On peut se laisser happer par les sensations, les impressions, comme dans un rêve. Se faire bercer par le son, la musique et les images projetées sur un écran panoramique.

Leitmotiv est l'oeuvre de l'auteure et scénographe Anaïe Dufresne qui signe aussi l'environnement vidéo (très réussi). Elle a travaillé en étroite collaboration avec des créateurs de divers horizons. La musique atmosphérique et la conception sonore sont l'oeuvre du DJ Jérôme Guilleaume. La mise en scène est signée Émilie Cormier, une comédienne finissante de l'UQAM qui faisait partie, avec deux des acteurs qu'elle dirige, de l'excellente production d'Yvonne, princesse de Bourgogne au Prospero, en décembre dernier.

Les quatre interprètes défendent cette partition avec sensibilité. Mais on se demande pourquoi ils utilisent tous des micros, au lieu de projeter le texte: cela crée une distance inutile, d'autant que, dans cette salle intime, le public est à proximité.

Il s'agit de la première production de la compagnie De Course Théâtre, à l'affiche pour quelques jours encore à La Chapelle. Au final, si le travail d'exploration théâtrale, sonore et visuelle est remarquable, le texte très littéraire, voire hermétique, ne nous a pas convaincus.

Leitmotiv d'Anaïe Dufresne, mise en scène d'Émilie Cormier, au Théâtre La Chapelle jusqu'au 11 février.