Créer, pour le CIRAAM, c'est réfléchir à la civilisation moderne en revisitant les mythes anciens. Ce que fait Pharmak (ha) os, dernière production de la compagnie de Pascal Contamine, présentée comme «un bilan de nos croyances, de leurs dérives et de leur mort, à l'aube du 21e siècle».

L'ambitieux projet prend appui sur un curieux fait divers: une jeune femme a été retrouvée inconsciente, apparemment victime d'un rituel. Elle ne se souvient de rien. Hospitalisée dans un institut psychiatrique, elle est embrigadée, comme les autres malades, par un patient qui veut leur faire jouer une pièce.

Le coeur de Pharmak (ha) os, c'est cette pièce de théâtre enchâssée dans l'autre et qui refait l'histoire de la première moitié du 20e siècle, de l'assassinat de l'archiduc François Ferdinand à Sarajevo au régime soviétique. La vaste fresque tisse de plus des liens avec le mythe d'Oedipe, à travers un personnage qui adhère au communisme et qui comprend, trop tard, le rôle qu'il a joué dans la grande machine à broyer les ennemis du peuple sous Staline.

Il y a bien sûr quelque chose de fascinant dans ces multiples chocs d'idées et de croyances, que Pascal Contamine raconte en multipliant les références politiques et littéraire: Bakounine, Rimbaud, la Bible, etc. Sa pièce n'a toutefois pas l'envergure de ses très grandes ambitions.

Sa fresque, sans véritable point focal, s'étire sur plus de deux heures (environ trois au total, incluant l'entracte) dans une logorrhée verbale à classer entre le discours et les envolées poétiques. Le cadre du récit est un prétexte bien mince pour revisiter de si complexes utopies.

L'auteur demeure trop présent dans ce texte trop dit, ponctué de passages outrageusement rimés (un effet de style agaçant). Les jeux de mots inspirés ainsi que les traits d'esprit ou d'humour se retrouvent au final noyés dans cette masse de mots.

Tiraillée entre la nécessité d'être crédible en fou dans un asile et celle de rejouer l'Histoire, la distribution est au mieux inégale. Pharmak (ha)os s'avère finalement une grande idée qui, comme les utopies qu'elle relate, craque sous son propre poids.

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Jusqu'au 17 décembre à Espace Libre.