Avec Après la fin, présentée à La Licorne en 2008, le comédien Maxime Denommée a confirmé son talent de metteur en scène. Il cumule les deux rôles et donne lui-même la réplique à Sophie Cadieux pour la reprise de la pièce du britannique Dennis Kelly, à l'affiche dès ce soir dans la petite salle d'Espace Go.

Une femme, Louise, se réveille dans le bunker d'un collègue, Mark, après une attaque nucléaire. Un dur lendemain de veille imaginé par le dramaturge britannique Dennis Kelly et que Maxime Denommée, qui signait sa deuxième mise en scène en carrière, a traduit en un huis clos étouffant dans l'ancienne Licorne. Sophie Cadieux et Maxim Gaudette interprétaient alors le tandem antagoniste. Pour la reprise, Maxime est forcé de remplacer Maxim.

Qu'un metteur en scène d'abord reconnu comme un talentueux comédien remplace lui-même un acteur qu'il a dirigé semble relever de l'évidence. «Je me suis rendu compte que c'était plus facile à dire qu'à faire», dit toutefois Maxime Denommée, avec un petit sourire. Il a en effet constaté qu'il avait du mal à «enlever sa tête de metteur en scène» pour plonger dans le rôle, même s'il le connaissait très bien.

«Au début, je me disais que j'allais imiter ce qu'avait fait Maxim (Gaudette), raconte-t-il. C'était bon, ce qu'il faisait, et je ne suis pas du genre à changer pour changer.» S'appuyant d'abord sur l'interprétation de son collègue et ami, il a fini par trouver son propre rythme, sa propre voix, sa propre musique. «L'interprétation s'est transformée toute seule», constate-t-il.

Maxime Denommée, qui s'est illustré l'an dernier dans l'excellente série Aveux, est sorti du Conservatoire d'art dramatique de Montréal en 1998. Il y avait croisé Maxim Gaudette et Sophie Cadieux, avec qui il a formé un sympathique trio dans Rumeurs.

Habitué du Théâtre de La Manufacture, où il joue régulièrement depuis 10 ans, il y a signé ses deux premières mises en scène: Tête première (2005) et Après la fin (2008).

L'idée de faire de la mise en scène s'est imposée d'elle-même, à force d'être dirigé par d'autres... et d'accumuler ses propres notes de travail. «On fini par se positionner comme acteur à force de travailler avec des metteurs en scène», explique-t-il, avant d'ajouter qu'il possède ce qu'il appelle «un don de la diplomatie» qui lui est fort utile pour «accompagner» - il ne dit pas «diriger» - d'autres comédiens.

Dure confrontation

L'acteur, qui est aussi musicien, a constaté qu'il travaille comme un chef d'orchestre. Il discute des enjeux psychologiques au début du travail et se concentre ensuite sur le texte: il en calcule le rythme, l'intensité et les silences. «Après la fin, c'est un texte très précis. C'est comme une partition avec des pauses, observe-t-il. Ça demande un travail de précision pour que ça ait l'air naturel.»

Après la fin n'est pas une pièce jolie. Bien que drôle par moment, elle consiste surtout en une confrontation dure entre deux êtres aux antipodes. Louise, qui ne lutte pas que pour sa survie, y affirme que d'ailleurs «la seule façon d'être détruit par quelqu'un, c'est de le laisser nous transformer en une autre qu'on n'est pas».

Maxime Denommée croit que c'est aussi vrai des États. «Je pense que c'est une manière pour l'auteur de dire que l'échec de la guerre au terrorisme ressemble à nos échecs amoureux, dit-il. On ne peut pas imposer à l'autre notre vision du monde.»

Visiblement interpellé par l'univers de Dennis Kelly, il entend monter une autre de ses pièces, Orphelin, toujours dans une traduction de Fanny Britt, pour la réouverture de La Licorne, en 2012. D'ici là, le comédien dirigera Hubert Proulx et Pierre Lebeau pour une lecture d'extraits de romans de Patrick Senécal qui se tiendra le 22 octobre à la Grande Bibliothèque. Un passage de Contre Dieu, encore inédit y sera même lu en primeur.

______________________________________________________________________________

Jusqu'au 16 octobre à Espace Go (salle 2).