Deux jeunes adultes se rencontrent sur un site de clavardage. Juliette (Sophie Desmarais) annonce presque d'emblée à son interlocuteur qu'elle veut se suicider. Elle ne veut toutefois pas le faire seule. Auguste (Jonathan Morier) répond à l'appel. Ensemble, ils planifient le lieu et l'heure de leur dernier voyage. Rendus à destination, les choses ne se passent pas exactement comme prévu...

Norway.Today, du dramaturge Igor Bauersima, part d'un synopsis digne d'un fait divers - un pacte de suicide conclu sur l'internet - pour parler non pas du malaise post-adolescent, mais d'une forme de distorsion de l'être autrement plus complexe: la quête d'une communication authentique à l'heure de l'internet... Le sujet n'est plus nouveau (la pièce a été écrite en 2000), mais le dramaturge l'explore avec intelligence.

Comment départager le vrai du faux, à une époque où chacun montre son meilleur profil sur sa page Facebook, soigne ses commentaires sur Twitter et se met en scène sur des sites de clavardage? Le mystère - et le drame - de Norway.Today se trouve dans cet écart entre ce qu'on est, ce qu'on dit être et ce qu'on veut montrer aux autres. Quitte à se mentir à soi-même.

Mise en scène confuse

De cette matière riche, mais aussi fuyante, Philippe Cyr n'a pas réussi à faire un spectacle convaincant tant sa mise en scène est confuse. Des séquences d'une grande tension dramatique alternent avec des moments d'une incompréhensible banalité, comme lorsqu'on voit défiler des images des grands fjords du monde pendant que les personnages montent une tente. L'intégration de la vidéo est à moitié réussie, entre autres parce que les images sont projetées sur un mur de planches ajourées qui est loin de constituer l'écran idéal...

Tiraillés entre la nécessité de jouer vrai, pour susciter l'adhésion, et de sonner faux pour traduire l'hyperconscience qu'ont Juliette et Auguste de l'image qu'ils projettent, les deux interprètes font de leur mieux. Souvent, ils donnent l'impression d'être laissés à eux-mêmes par un metteur en scène qui, en s'efforçant de ne pas départager ce qui est sincère de ce qui relève de la pose (ce qui est défendable), a fini par perdre le nord. Dommage qu'il n'ait pas su proposer une vision plus nette de cette oeuvre au propos actuel.

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Norway. Today, jusqu'au 16 octobre chez Prospero.