Haines féroces entre clans catholiques et protestants, amours passionnées, complots vicieux, orgueils démesurés, rien dans La reine Margot ne supporte la demi-mesure. La metteure en scène Marie-Josée Bastien l'a parfaitement saisi. Son adaptation du roman de Dumas père, présentement à l'affiche du Théâtre Denise-Pelletier, donne lieu à un spectacle vif et prenant, un brin classique, mais qui s'avère le vivarium idéal pour accueillir un tel déchaînement de passions.

L'épisode aventureux relaté dans la pièce tient dans deux années de la vie de la princesse Marguerite de Valois (Marie-Ève Pelletier). Il débute juste avant son mariage avec Henri de Navarre (Simon Rousseau) et s'achève sur la mort de son frère Charles IX (Jonathan Gagnon). L'alliance a été conclue contre le gré des époux pour calmer les énormes tensions entre catholiques et protestants de France. L'échec sera total puisqu'il mènera au terrible massacre de la Saint-Barthélemy.

 

La lutte de pouvoir qui oppose les deux clans ne constitue pas seulement la toile de fond de la pièce, elle en est également le principal moteur. Chaque complot et chaque meurtre fait partie d'un plan pour consolider la position d'un clan ou malmener l'autre. Les amitiés et les amours des uns et des autres sont jugés à l'aune de ces intégrismes religieux. Ces enjeux complexes, Marie-Josée Bastien a su les rendre limpides, si bien qu'on ne perd jamais le fil malgré la rapidité avec laquelle les tableaux s'enchaînent.

En optant pour un minimum d'accessoire et un décor dépouillé, la metteure en scène laisse un maximum de place à l'action et aux acteurs. L'aire de jeu est donc livrée à leur corps à corps, qu'ils soient amoureux, purement charnels ou guerriers (très bonnes scènes de cape et d'épée). Ce sont ces pulsions, ces poussées de désirs et ces soifs de vengeance, qui passent dans les corps des acteurs qui font vivre ce spectacle épique.

Les éclairages en clair obscur plongent judicieusement dans la pénombre tout l'espace qui se trouve derrière les arcades de pierre entourant la scène. Là, dans l'obscurité, on aperçoit toujours une ou plusieurs silhouettes. Ce n'est pas qu'une judicieuse illustration de l'expression «les murs ont des oreilles», c'est une manière fort à propos d'insister sur le climat de complot qui règne dans le monde de Navarre et de Margot.

Les trois actrices se détachent d'emblée d'une distribution majoritairement masculine. Marie-Ève Pelletier campe une Margot brûlante d'amour et de colère, mais aussi dédaigneuse et fragile. Danielle Lépine affiche la rigidité et la vilenie qui correspond à la légende noire de Catherine de Médicis. Marie Soleil Dion (Henriette de Nevers) papillonne d'une intrigue à l'autre avec une légèreté rieuse, qui met un peu de soleil dans un univers autrement lourd, mais porté à la scène avec une vivacité divertissante.

Jusqu'au 21 avril au Théâtre Denise-Pelletier.