Pas de théâtre musical sans... musique. Près d'un an après avoir annoncé la mise en chantier d'une version en partie chantée des Belles-soeurs de Michel Tremblay par René Richard Cyr, le Théâtre d'Aujourd'hui a levé le voile, hier, sur l'élément le plus secret du projet: les airs composés par Daniel Bélanger. Les deux extraits entendus annoncent un spectacle tonique aux accents de musique soul.

«Je me suis inspiré de ce que pouvait écouter ma mère avec son transistor, en 1965, dans la cuisine», explique Daniel Bélanger. Il a pensé à Aznavour, mais surtout à la musique populaire américaine de l'époque. Au son Motown. «Au sens large», tient-il à préciser. Le populaire auteur et compositeur ne se sent pas la légitimité de revendiquer des racines musicales noires.

Ce qu'on entend, outre la très évidente signature de Bélanger dans le deuxième air interprété hier, ce sont pourtant des effluves de soul, de R&B et de gospel. L'esprit est résolument nord-américain et pas folklorique pour deux sous. «Je ne suis pas allé en dehors de ce que je suis capable de faire, en ce sens que, de la musique nord-américaine, j'en fais depuis mon premier disque», signale le compositeur.

L'approche musicale privilégiée par Daniel Bélanger est très pop et très actuelle même si les inspirations datent. Il est d'ailleurs assez tentant de faire des liens entre l'esthétique de Nous, le dernier disque de l'auteur-compositeur-interprète, et les mélodies entendues hier. Ces airs toniques contribueront sans doute à alléger le propos parfois très sombre de la pièce de Michel Tremblay où 15 femmes de la classe ouvrière dévoilent leurs failles, leurs douleurs et leur ressentiment.

«Je n'ai jamais vu Les belles-soeurs, admet Daniel Bélanger. Je n'avais pas d'idée préconçue quant à ce que Rose Ouimet, par exemple, pouvait chanter ou de la manière qu'elle pouvait le faire. Après, c'était à René Richard de voir si ça collait, si c'était cohérent. Ça lui plaisait bien parce que la musique amenait une autre lecture de la pièce. De son côté misérabiliste, notamment.»

Le bonheur ou la frustration s'avèrent en effet magnifiés par ces musiques (comme c'est le cas avec le gospel) que Bélanger a conçues pour susciter l'adhésion dès la première écoute. «Il faut fesser fort et sans compromis, résume Daniel Bélanger, qui dit avoir eu beaucoup de plaisir à composer ces mélodies qui doivent séduire, sans êtres racoleuses. Ce que je souhaiterais, c'est qu'une personne sorte de la salle avec l'une des chansons dans la tête.»

Sur la scène du Théâtre d'Aujourd'hui, à compter du 29 mars, la quinzaine de belles-soeurs (dont Marie-Thérère Fortin, Guylaine Tremblay, Maude Guérin, Kathleen Fortin, Dominique Quesnel, Monique Richard et Suzanne Lemoine) seront accompagnées par un groupe que la production a surnommé les «beaux-frères». François Marion (contrebasse et basse électrique), Serge Arsenault (accordéon, claviers et trombone) et Martin Marcotte (batterie et percussions) seront dirigés par Stéphane Aubin, qui était au piano, hier, pour la répétition publique.