Ravis de leur rencontre avec les mots de Molière, à l'automne 2008, Francis Colpron et son ensemble Les Boréades renouent avec la comédie d'époque. Avec le concours du metteur en scène Jean-François Gagnon et du comédien Carl Béchard, ils proposent Les Tabarinades, un « théâtre des variétés « à la mode du Grand Siècle.

On ne peut pas passer sa vie à fouiller le XVIIe siècle français sans trouver le théâtre sur son chemin. Spécialiste du baroque français et directeur artistique de l'ensemble Les Boréades, Francis Colpron l'a confirmé à l'automne 2008 en proposant un programme constitué d'oeuvres de Lully et Charpentier, articulé autour de textes de Molière lus par les comédiens Sophie Faucher et Carl Béchard. Idée heureuse, qui lui a donné envie de poursuive l'aventure.

 

«J'ai voulu passer à l'étape suivante: avoir des acteurs qui jouent et de la musique autour», raconte le flûtiste, entre deux répétitions. Avec la collaboration du metteur en scène Jean-François Gagnon, spécialiste de la commedia dell'arte, il a concocté Les Tabarinades, un spectacle de théâtre musical qui s'appuie sur des textes de Tabarin, grand comique ayant exercé une forte influence sur le jeune homme qui allait devenir Molière.

Tabarin, surnommé le «prince des bouffons», était un charlatan. Juché sur une estrade soutenue par des tréteaux, il jouait des saynètes comiques dont le personnage central était un médecin (le docteur Mondor) et, aux abords de la scène, faisait commerce de pommades, drogues et autres remèdes. «Son but était de vendre des potions. Mais ses textes étaient bien écrits, structurés», fait valoir Francis Colpron.

L'inspirateur de Molière n'était-il qu'un vulgaire publicitaire? Jean-François Gagnon sourit: «Dans le texte, observe-t-il, on ne retrouve pas d'éléments qui concernent la vente.» Le nom de Tabarin n'a pas traversé trois siècles d'histoire pour ses talents en affaires, mais pour le sens du comique qu'il déploie dans ses «questions tabariniques». Ces dialogues mettent aux prises un supposé savant (Mondor) sans cesse questionné par un valet malicieux (Tabarin) qui tourne en dérision chacune de ses réponses.

«Je trouve ça ludique, ce théâtre-là», lance Francis Colpron, qui dit trouver le monde de la musique ancienne très «sérieux». Les maîtres d'oeuvre des Tabarinades veulent amuser dans «l'esprit» du XVIIe siècle. Ce qui implique forcément un sérieux boulot de recherche, d'adaptation et de reconstitution de textes ou de partitions. Tant le directeur artistique des Boréades que le metteur en scène ont travaillé à partir de canevas de l'époque, qu'ils ont mariés.

Ainsi, le spectacle mettra de l'avant quatre de ces «questions tabariniques» et La farce du sac. Francis Colpron a choisi des musiques de plusieurs compositeurs méconnus, mais aussi cinq morceaux de Lully, dont quatre tirés du Bourgeois gentilhomme. La place qu'il donne au maître de musique italien dans les Tabarinades rachètera peut-être l'injustice qu'on lui fait présentement au TNM: sa musique a en effet été totalement évacuée de l'extravagante production signée Benoît Brière.

«On a établi dès le départ que la musique doit prendre son pied, assure Francis Colpron. Elle ne doit pas seulement soutenir l'action, mais même lui voler la vedette par moments.»

Les Tabarinades, ce soir, 20h, à la salle Ludger-Duvernay du Monument-National.