La marionnette québécoise voyage comme jamais. Les troupes d'ici sont invitées partout dans les plus grands spectacles du genre. Parmi elles, le Théâtre Motus a créé, en huit ans seulement, cinq spectacles qui ont tous voyagé à l'étranger.

Hélène Ducharme touche du bois, c'est le cas de le dire. Et tout ce que touche la présidente de l'Association québécoise des marionnettistes et codirectrice artistique du Théâtre Motus, qu'elle a fondé avec son conjoint Sylvain Massé, semble se transformer en or ces temps-ci.

Le théâtre de marionnettes québécois n'est certes pas inscrit en Bourse, mais la trentaine de compagnies existantes ont le vent dans les voiles. La reconnaissance internationale, des diffuseurs et des grands festivals, est irréfutable.

«Tous les gens veulent faire une vitrine sur la marionnette québécoise en ce moment. Il y a de grandes troupes ici», lance Hélène Ducharme.

Mettant en vedette Wildemir Normil, Baobab, le plus récent spectacle du Théâtre Motus, sera présenté à la Maison Théâtre de Montréal du 1er décembre au 3 janvier 2010, mais intéresse déjà des festivals aux États-Unis.

«Le côté interculturel intéresse les gens, explique-t-elle. Les gens ont le goût de découvrir la culture africaine. Ça n'aurait pas été le cas il y a cinq ans. Le spectacle prendra part à un marché de spectacles jeunesse aux États-Unis. C'est notre première percée là-bas, ce qui nous a mis en contact avec des festivals à Chicago, à Pittsburgh et à New York.»

La compagnie prépare aussi une adaptation de Cyrano de Bergerac en théâtre d'objets pour les adolescents.

Dire que tout avait commencé sous de bien étranges augures il y a huit ans... La première journée de répétition de Nombril, le tout premier spectacle du Théâtre Motus, a eu lieu un certain 11 septembre 2001. Un spectacle sans paroles sur les beautés de la naissance et de la vie.

«On était catastrophés, raconte-t-elle. Mais cela a créé des liens et une connivence avec le Théâtre de la ville à Longueuil. Nous y sommes en résidence et recevons un excellent appui.»

D'actrice à marionnettiste

Après sa formation de comédienne en 1990, Hélène Ducharme a écrit et joué. En découvrant la marionnette à la Dame de coeur et au Théâtre de l'oeil, elle décide d'écrire et de mettre en scène pour ce média.

«Autant le public que le milieu nous ont bien accueillis avec Nombril en 2001, raconte-t-elle. On l'a tourné partout dans le monde. Même chose avec La crise.»

Créée durant le boycottage des activités culturelles des enseignants, la pièce suivante, Inuussia la femme phoque, en ce moment à Tolosa en Espagne, n'a donc pas eu la vie aussi facile au départ. Mais le Théâtre Motus est déjà loin.

Son quatrième spectacle, Bulles, a été présenté l'an dernier. Il s'agit d'un spectacle extérieur dans des «bulles ressemblant à un abri Tempo» où 25 spectateurs s'installent pour assister à des contes interprétés par de micromarionnettes.

«C'est une idée de théâtre de rue que nous sommes en train de vendre en France et en Espagne, explique l'auteure. On le joue en extérieur, l'hiver. Les bulles sont blanches, on peut y faire du théâtre d'ombres.»

Art à part entière

Convaincue et convaincante, Hélène Ducharme se bat contre la perception que les marionnettes, comme les clowns ou les mimes, représentent une forme d'expression qui n'est pas vraiment un art à part entière.

«On a une reconnaissance internationale et des diffuseurs, mais une partie des médias et des gens du théâtre adulte nous voient encore comme un sous-art. Comme si c'était plus facile parce que ça s'adresse aux enfants. C'est insultant pour nous et pour les enfants.»

Les compagnies québécoises ne jouent d'ailleurs presque pas dans les écoles. Pourtant, c'est là que le public les croit omniprésentes.

«C'est en salle que ça se passe et non dans les gymnases. C'est comme ceux qui croient que fabriquer des marionnettes, les entretenir, les réparer et former des marionnettistes est peu onéreux. Prendre des comédiens est plus simple et coûte moins cher», conclut-elle en faisant flèche de tout bois.

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EN UN MOT

Active activiste marionnettiste.

Montréal, c'est...

«Une grande famille de création que tous les artistes canadiens nous envient.»

Que dit-on de Montréal ailleurs?

«C'est remarquable comment les gens admirent ce que nous faisons comme créateurs ici. On dit Montréal et tout de suite, il y a une réaction, une adhésion.»

Que manque-t-il à Montréal?

«Le public est merveilleux, mais il manque une certaine reconnaissance de notre art. Je veux mettre l'accent sur les communications à l'Association québécoise des marionnettistes pour mettre fin à cette méconnaissance.»

À voir sur le web

theatremotus.com aqm.ca

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