C'est le retour à la Maison Théâtre d'EtiEn, pièce pour ados créée en 2002 misant sur l'intérêt des jeunes pour le cyberespace. Mettant en scène un jeune hacker (pirate de l'informatique) aux prises avec les contradictions de sa propre révolte, l'auteur Sarto Gendron questionne avec plus ou moins d'habileté le fonctionnement de notre société contemporaine.

Habité d'une grande colère qui semble se canaliser dans un mystérieux coup fumant, EtiEn@vil.pout (son pseudonyme) pioche frénétiquement sur son clavier d'ordinateur, bien caché dans la maison d'un peintre marginal. Son but demeure brumeux, mais sa révolte, elle, est bien tangible. Malgré l'acharnement d'un policier de la GRC à ses trousses et la bonne foi d'une mère dépassée, prête à l'acte de foi, le jeune délinquant choisit de mener à terme son projet: «mettre des bâtons dans la roue qui fait tourner le monde». Détournements de fonds, dévoilement de secrets d'armée et ultimement, incursion dans le réseau mondial des communications, le jeune EtiEn ne manque pas d'imagination, ni d'ambition.

 

L'ennui avec cette pièce (dont l'idée de départ a tout pour séduire) est qu'elle repose sur un tas d'idées reçues, tant au niveau du texte que de la mise en scène. Ainsi, l'auteur nous présente trois protagonistes archétypaux: une mère de famille monoparentale obnubilée par sa carrière et branchée sur son BlackBerry comme on le serait sur un respirateur (France Parent); un policier un peu benêt cumulant les blagues idiotes (Mario Borges) et un jeune homme qui cultive avec complaisance sa rébellion (Joachim Tanguay).

Le propos s'enlise dans une suite de dialogues répétitifs où la sédition d'EtiEn se frappe constamment à l'étonnement de la mère, tandis que le représentant de la loi se borne à espérer arrêter le jeune agitateur. La seule véritable action (hormis une scène plus active où l'agent se fait double) demeure la mise à exécution du projet final d'EtiEn: libérer le monde de la technologie, des cellulaires, des ordinateurs et du web. À entendre le personnage de la mère se découvrir une soudaine envie de cultiver des betteraves lorsque son téléphone s'éteint, on se dit que jamais nous n'avons été aussi loin des adolescents d'aujourd'hui. Un soupir parcourt d'ailleurs la jeune assistance qui en a plus que marre de se faire faire la morale à ce sujet.

Axée elle aussi sur les clichés d'usage, la mise en scène de Michel Bérubé souligne malheureusement la présomption de l'auteur. Malgré une scénographie intéressante de Simon Guilbault (l'univers de la mère se résume à un intérieur de voiture, celui du fils repose sur l'autoroute nouée des filages et la «Toile» rappelle les toiles d'Arthur Villeneuve), l'ensemble traduit une vision fausse (peut-être nostalgique?) de l'adolescence, l'insurrection sans nuance et la musique rock à l'appui. On se demande quel ado pourra s'y reconnaître...

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EtiEn, de Sarto Gendron, mise en scène de Michel Bérubé, à la Maison Théâtre jusqu'au 27 février. Pour les 13 ans et plus.