Labyrinthe devrait rendre les adolescents un peu plus empathiques quand ils repasseront au métro Berri-UQAM. La pièce de la compagnie Youtheatre permet à son public de se sensibiliser aux problèmes des jeunes de la rue. Ou du moins, de relativiser ses propres problèmes.

Labyrinthe, c'est la rencontre de deux éclopés. L'action se déroule dans la toilette des filles d'un Dunkin' Donuts. Le restaurant doit fermer dans une heure. Jean-Stéphane, un petit bum aux allures de squeegee, s'y cache car il vient de «faire une connerie». Il surprend Maude, jeune Abitibienne en fugue qui attend nerveusement que son copain la rejoigne.

 

Il ne s'agit pas du choc de deux destins. Plus simplement de deux jeunes en dérive qui se croisent, avant de reprendre chacun leur chemin.

Au risque de paraître grossier ou inculte, on pourrait qualifier l'oeuvre de théâtre emo. L'auteure Nathalie Boisvert ne gave pas son public d'optimisme puéril et de bons sentiments. Elle crée un univers tache d'encre. Tout ou presque prend la couleur du noir. La violence est autant infligée que subie par ces petits toughs patentés, qui ne sont finalement que des hypersensibles. Chacun s'enlise dans son propre cul-de-sac. On ne découvre pas de solutions. Seulement quelques miettes d'espoir à la fin.

Réflexion sur l'identité

Dans l'ensemble, la pièce est assez bien écrite et bien jouée. Dès le début, on est happé par le réalisme cru de jeu d'Ève Landry (Maude). Mais la crédibilité des dialogues souffre parfois de la langue un peu trop riche et forcée - surtout pour l'autre personnage, Jean-Stéphane (Benoît Drouin-Germain).

La scénographie (cuvette, graffitis, cloisons...) permet de construire efficacement la toilette du Dunkin'. Maude et Jean-Stéphane s'y côtoient tout en paraissant souvent isolés. Des projections vidéo se greffent brièvement au récit. On y entend la voix du copain de Maude, Pierre. La narration est impressionniste. Par le plan en plongée, on le devine au sommet de la Place Ville-Marie. En équilibre, avec une décision irrévocable à prendre.

Labyrinthe est traversée par une réflexion sur l'identité. Les deux personnages cherchent à se définir malgré toutes les pressions de leur entourage. «On veut me démolir dans la tête», lance Jean-Stéphane. Cela frôle parfois la victimisation. Les protagonistes sont aussi optimistes qu'une cenne noire qui attend le prochain train.

Labyrinthe est la première création francophone de la compagnie Youtheatre, vieille de 40 ans. En quelque 50 minutes, elle brosse un tableau assez évocateur. En visant avant tout le réalisme, la pièce s'adresse à la sensibilité et à l'intelligence de son jeune public. C'est sa principale force.

Labyrinthe, du Youtheatre, jeudi dernier au Centre Calixa-Lavallée. En tournée dans les écoles secondaires du Québec.