Julien Lacroix et Adib Alkhalidey tourneront en mai leur premier long métrage web, qui devrait voir le jour en janvier 2019. Les deux humoristes et coauteurs de cette tragicomédie seront en vedette dans ce projet au budget de 150 000 $, qu'ils produiront sans subvention, mais avec l'aide du public. On y suivra Walid (Adib), un homme dépressif, et Antonin (Julien), un imbécile heureux qui se donne pour mission de sauver son collègue, décidé à mettre fin à ses jours sur son lieu de travail.

Comment l'idée de ce film web vous est-elle venue ?

Adib : On était en route vers Ottawa l'an dernier et Julien faisait la première partie de mon spectacle. On a commencé à parler de cinéma dans la voiture et Julien m'a demandé pourquoi on ne ferait pas un film web. À partir de ce moment, on a commencé à se rencontrer chaque semaine pour bien cerner notre sujet.

Julien : On parlait de ce qu'on aimait au cinéma, du fait qu'on apprécie avoir autant le petit frisson d'un drame qu'une comédie. On s'est donné pour mot d'ordre que si on en parlait, on allait le faire. On déteste tous les deux les gens qui nous disent qu'ils ont des projets ou des idées mais qui ne font rien.

Adib : On n'a raté aucune rencontre ! J'étais en France pour deux mois et on a fait nos meetings par téléphone ou sur l'ordi. Pour deux TDAH, on a été super organisés !

Est-ce que ce long métrage se retrouve sur le web par défaut, faute de financement pour être au grand écran ?

Adib : Il n'est pas question ici de vouloir contourner les méthodes traditionnelles ou d'envoyer chier tout le monde. On est partis dans l'idée de faire le premier film web au Québec. Si on ne le fait pas là, tout de suite, avec l'énergie qu'on a appris à cultiver sur le web, on ne le fera jamais. Ça fait deux ans qu'on raconte des histoires de trois minutes sur le web. On veut maintenant en raconter une d'une heure. C'est ce qui nous motive.

Julien : Il y avait aussi cette urgence de faire un film. On a tous les deux la chance d'avoir des plateformes web qui sont vues. Avec Netflix, je regarde désormais mes films à la maison. On est deux amis qui ont une vision similaire du cinéma. Alors amusons-nous et faisons un film !

Donc votre film ne se retrouvera jamais au cinéma ?

Adib : On va montrer le film en salle, mais pas en salle de cinéma. On n'a pas encore envie de rentrer dans le réseau cinématographique traditionnel. On sera, Julien et moi, dans la salle !

Julien : Les gens sont habitués de consommer nos vidéos seuls. C'est autre chose d'être avec des gens qui partagent un humour commun.

Vous demandez au public de participer au financement en donnant 65 000 $ en 60 jours. À quoi va servir cet argent ?

Adib : Il faut que les gens soient généreux rapidement. La qualité du projet repose entre leurs mains. C'est avec le soutien du public qu'on va savoir si on fait quelque chose qui se rapproche du cinéma ou qui reste très web. L'argent nous sert à l'équipe technique. On ne met rien dans nos poches ! Même ma mère m'a proposé de me prêter de l'argent, elle qui n'en a pas beaucoup ! Elle trouve ça inspirant. En ce moment, on a plus de soutien de la famille que de l'industrie.

Julien : Les dates et les locations sont pas mal toutes réservées. Alors quoi qu'il arrive, on va le faire. On a eu plein de propositions de commandites. Mais payer l'équipe est notre mot d'ordre.

Pourquoi devrait-on investir dans ce projet ?

Adib : On donne quelque chose en retour : des affiches, des billets, des scénarios signés, etc. Ça fait des années qu'on vous donne du contenu gratuit, bande de radins [rires] ! Les gens doivent sortir de leur habitude de consommer gratuitement sur le web. Tous ceux qui ont un tant soit peu ri à l'une de nos vidéos seront fiers d'avoir participé au financement du film.

Julien : Aidez-nous à financer un film dans lequel on se pousse, où on essaie d'inventer un modèle.

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Adib Alkhalidey et Julien Lacroix seront au Théâtre Fairmount les 10 et 11 avril dans le cadre du DMobilo Aquafest, puis au Club Soda le 8 septembre. Tous les profits de ces représentations iront au financement du long métrage.

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, LA PRESSE

Le tournage du film devrait débuter en mai, pour un lancement en janvier 2019.