Pour Jay Du Temple, chaque décision est réfléchie. Sa carrière est une partie d'échecs. Et son choix d'animer Occupation double Bali à l'automne n'est qu'un déplacement de plus vers le roi.

Il y a un an, Jay Du Temple a lancé son Mini tour, une tournée de spectacles qui devait compter 10 représentations seulement. Mais il s'est pris à son propre jeu.

«Au départ, je voyais ça comme une façon de m'exercer à faire une heure trente sur scène, ce que je n'avais jamais fait. Sans l'aide d'un producteur, j'ai booké des salles, mais finalement, puisque c'était plein partout, j'ai fait 24 représentations du Mini tour», dit l'acteur de Like-moi!, coanimateur de Code G. et animateur d'Urbart.

Devant ce joli succès, il a décidé de continuer à surfer sur la vague: le Mini tour fera bientôt place au Moyen tour, qui débutera au M Telus (ancien Métropolis) vendredi prochain.

«Le contenant change, mais pas le contenu. Il y a plus de villes, plus de dates, mais ça reste du rodage en vue de mon premier one-man show que je présenterai l'an prochain, en milieu d'année.»

Le finissant de l'École nationale de l'humour 2013 se distingue de la grande majorité des humoristes en produisant lui-même ses spectacles, avec sa soeur aînée, Laurie Du Temple-Quirion, qui est devenue son imprésario.

«Avant elle, j'avais une autre gérante, qui est aussi une amie. Malheureusement, ça n'allait pas assez vite à mon goût. Quand j'ai pris la décision d'arrêter de travailler avec elle, je me suis mis à penser à toutes les boîtes et à tous les gérants que je connaissais. Mais je ne me voyais pas travailler avec un monsieur ou une madame dans une boîte de production. C'est là que j'ai pensé à ma soeur», confie Jay Du Temple.

Entrepreneur dans l'âme

Tout comme leurs parents (propriétaires du vignoble Domaine St-Jacques), Jay et Laurie ont la fibre entrepreneuriale, et le défi d'être leur propre patron les enchante.

«Il y a beaucoup de ressemblances entre le vignoble et l'humour, avance le jeune humoriste. Dans les deux cas, c'est du luxe. Ce n'est pas la priorité des gens d'acheter une bouteille de vin ou un billet pour un show. Et ce sont des milieux très compétitifs. J'ai vu mes parents être passionnés, avoir du front et oser. Je m'en inspire.»

Parmi les avantages de l'autoproduction, il souligne celui de pouvoir fixer les prix des billets de ses spectacles (20 $ pour le Mini tour et 25 $ pour le Moyen tour, excluant les frais de service). Il décide aussi du matériel qu'il présente sur scène, des salles où il se produit, de son habillement, de ses publicités, de l'humoriste qui assure sa première partie...

«C'est sûr qu'il y a aussi des désavantages. Quand une boîte de production qui a de gros noms appelle pour booker son nouveau poulain, c'est certain que le diffuseur est plus ouvert à le prendre. Tandis que lorsque ma soeur appelle et qu'elle mentionne que je me produis moi-même, il y en a qui lui disent: "Non merci"», illustre Jay Du Temple.

Vent de changement

Jay Du Temple fait remarquer qu'il n'est pas le seul humoriste à tenter de faire les choses différemment. La popularité des réseaux sociaux leur permet d'y arriver, puisqu'ils peuvent s'adresser directement à leur public. Il constate également un engouement pour les soirées d'humour, une manière de se faire découvrir. C'est d'ailleurs au bar Le Jockey qu'il a appris son métier, notamment en animant une soirée d'humour tous les lundis pendant trois ans.

Il y a aussi beaucoup plus de diffuseurs qui offrent leurs salles aux humoristes.

«Le réseau des petites salles se développe. Nous avons accès à des salles plus tôt dans notre carrière. Avant, il y avait 10-15 humoristes qui roulaient un one-man show. Maintenant, nous sommes au-dessus de 40. Mais les 40 ne peuvent pas remplir le St-Denis et je m'inclus là-dedans. C'est là que de plus petites salles, c'est vraiment le fun pour nous», dit celui qui présente le Moyen tour jusqu'au 23 mars 2018.

L'humoriste de ces dames

La Presse a assisté à une des représentations du Mini tour au collège Letendre, à Laval, où la salle était comble et majoritairement composée de spectatrices. Même sur scène, Jay Du Temple s'en est amusé: «Je vais vous donner un conseil, les gars... Ah, c'est vrai, il doit y en avoir juste six dans la salle», a-t-il lancé en s'esclaffant.

«Oui, je me fais dire par des gens que si ça fonctionne pour moi, c'est parce que je suis beau. Je trouve que c'est un manque de respect. Pas pour moi, mais pour mon public. Comme si c'était des épaisses qui viennent au spectacle juste pour me regarder», explique-t-il.

En creusant le sujet, Jay Du Temple confie que sa beauté l'a plus ennuyé qu'autre chose, lors de ses débuts dans la profession. Il ne faisait d'ailleurs jamais de blagues sur son apparence physique, cachait ses muscles sous des chandails à manches longues et enlevait tous ses bijoux pour ne pas attirer le regard sur son corps. Malgré tout, notamment au bar Le Jockey, les autres humoristes ne se gênaient pas pour lui dire que le public était surtout féminin lorsque c'était lui qui animait.

Avec le temps, l'humoriste a appris à assumer son physique, parce qu'il a maintenant confiance en son talent d'humoriste. Il écrit en ce moment son premier roman pour le collectif «Histoires de gars», avec Patrick Senécal et Simon Lafrance, aux Éditions Goélette.

Le célibataire de 25 ans s'envole pour Bali ce mois-ci, d'où il animera la prochaine édition d'Occupation double, qui sera diffusée sur V. Il avoue avoir hésité avant d'accepter cette offre, puisqu'il avait déjà une douzaine de représentations du Moyen tour prévues cet automne.

«Mais finalement, le producteur en moi a vu que ça aiderait à financer mon show. Et c'est de la promotion pour moi, puisque des gens vont me découvrir et ça m'aidera à vendre encore plus de billets à mon retour», conclut-il.