L'humoriste française Muriel Robin a renoué avec son public - et avec le succès - après huit ans d'absence de la scène avec Robin revient... Tsoin tsoin!, son spectacle solo le plus autobiographique, qu'elle présentera à Montréal le 5 juin. Un cadeau pour ses fans d'ici, puisque Muriel Robin n'a pas mis les pieds au Québec depuis plus de 20 ans! Notre journaliste Chantal Guy lui a parlé.

Pourquoi avez-vous été absente de la scène pendant toutes ces années?

Parce que je n'en avais plus envie. Je voulais faire autre chose, être dans la vraie vie... Je n'avais pas le sentiment d'avoir des choses à dire. Comme vous le savez, quand on est seule sur scène, le texte compte beaucoup. J'avais besoin d'un sens, de quelque chose à donner au public. J'ai choisi de partager un peu mon expérience, de donner une sorte d'espoir. Je voulais dire que, même si on vieillit - je vais avoir 60 ans l'année prochaine -, ce n'est jamais fini; on peut traverser des choses et voir la lumière à un moment.

Ce spectacle a été accueilli très chaleureusement en France; c'est un triomphe plutôt unanime.

Oui, très! J'ai été récompensée. J'ai toujours écrit avec Pierre Palmade, mais ce spectacle-là seule, je l'ai écrit seule. Même si je l'ai écrit dans le regard de quelqu'un, avec une amie comédienne [Clara Guipont], ce sont mes mots. Je me suis mis une grosse pression et il fallait que je gagne, parce qu'il fallait que ce soit vrai et drôle. J'avais aussi envie qu'il y ait de l'émotion. Mais je n'aime pas les émotions frontales; j'aime quand l'émotion est derrière, qu'on ne la sent pas et que, tout d'un coup, on se dit: «Ah, j'ai quelque chose dans la gorge...» Je voulais réussir ça et, ma foi, ç'a été reconnu et ça me donne une grande satisfaction. Vraiment.

Votre spectacle est plus autobiographique. Est-ce plus difficile, plus casse-gueule?

Je crois que c'est beaucoup plus compliqué. On ne peut pas être dans la formule. On est dans quelque chose à dire; il faut taper dans ce qui est moins drôle de la vie, car c'est avec ça qu'on va faire rire. C'est par après que je me suis dit que j'avais pris un risque, parce que je ne pouvais pas faire comme avant. Je parle de la vie, mais de façon tellement intime... Je dis vraiment des choses sur moi, tout est vrai. Comme vous le savez, il faut être intime pour être universel.

Comment fait-on pour aborder un sujet aussi grave que l'alzheimer, d'autant plus que cette maladie a touché votre mère?

Un spectacle n'est pas une thérapie. C'est parce que j'ai réglé ça avant que je peux prendre ça comme de la pâte et en faire ce que je veux. Ça n'enlèvera jamais le chagrin de la maladie de ma maman. C'est comme si je donnais l'autorisation d'en rire, alors qu'il y a beaucoup de gens touchés par cette maladie, qui est dramatique et jamais drôle. Pendant que je vivais cela, je me disais que j'allais faire quelque chose là-dessus un jour, parce que c'est trop riche, trop incroyable, trop fou, trop plein de choses. Et je suis contente, dans mon spectacle, de pouvoir passer un moment avec ma mère et de lui rendre un petit hommage.

Vous abordez votre homosexualité dans ce spectacle. Qu'avez-vous pensé des manifestations contre le mariage gai en France?

D'abord, je l'aborde très peu. Pour moi, ce n'était pas très intéressant de développer quelque chose là-dessus, parce que je ne trouvais pas la drôlerie. Je parle des choses qui m'ont construite et déconstruite, et ça n'en fait pas partie; c'est un état. Mais pour répondre à votre question, je dirais que je comprends tout le monde, sans être d'accord avec tout le monde. Si on se met à la place de ces gens qui ont entendu toute leur vie des choses intolérantes, eh bien, ils reproduisent ces schèmes-là qui devront bien cesser un jour. Réjouissons-nous plutôt des avancées.

Correspondez-vous à cette idée que le clown, au fond, est triste?

Oh, c'est un peu caricatural. Je ne sais pas s'il est triste, parce que je ne crois pas être triste. Mais le clown, il est désespéré! [rires] Ce n'est pas parce qu'on est désespéré qu'on est triste. Le clown fait rire parce qu'il pense que tout le monde est comme lui. C'est pour ça qu'il choisit de rire de tout et de faire rire de tout, et surtout des choses les plus dures. Parce qu'il y a du rire qui fait du bien.

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Au Théâtre Maisonneuve de la Place des Arts le 5 juin.