Le polémiste Dieudonné a annoncé samedi qu'il renonçait à donner son spectacle Le Mur, interdit par la justice française pour ses sorties antisémites, au profit d'un one-man-show consacré à l'Afrique et de nature selon lui à calmer le jeu, mais son théâtre parisien restait bloqué par la police.

Dans ce nouveau spectacle intitulé «Asu Zoa» («la face de l'éléphant» en langue Ewondo du Cameroun), il n'y aura aucun des termes visés par les arrêtés d'interdiction qui ont frappé ces derniers jours des représentations qu'il avait prévu de donner à Paris, Nantes (ouest), Tours et Orléans (centre).

Sa décision de se «conformer à la loi» a été consignée dans un procès-verbal établi par des policiers venus lui signifier l'interdiction de son spectacle. «Je crois qu'on attendait cet engagement de ma part», a-t-il dit devant la presse dans son fief de La Main d'Or.

Une représentation de son nouveau spectacle était prévue pour samedi après-midi dans ce théâtre parisien, mais n'a pas eu lieu. À l'heure dite, les environs du bâtiment étaient bouclés par les forces de l'ordre.

À l'entrée, une centaine de partisans de Dieudonné s'étaient regroupés, entonnant tantôt l'hymne national français, «La Marseillaise», tantôt des chants du polémiste. Une dame d'une soixantaine d'années a crié : «Vive la dictature juive !». Un jeune homme insultait une journaliste de télévision.

En début de soirée, un porte-parole de Dieudonné est venu dire à ses admirateurs qu'il n'y aurait pas de représentation, «ni de l'ancienne, ni de la nouvelle version», qui n'est d'ailleurs pas «complètement prête selon lui». «Demain est un autre jour...», a-t-il ajouté.

«J'espère que les choses vont se détendre maintenant» et que le Conseil d'État, la plus haute juridiction administrative française, va «prendre en compte» cette décision de se «conformer à la loi», avait auparavant déclaré devant les caméras Dieudonné, revêtu d'un costume traditionnel africain.

Pour la troisième fois en trois jours, cette instance a confirmé l'interdiction d'une représentation, celle qui était prévue pour samedi soir à Orléans. Elle avait déjà fait de même pour Nantes et Tours.

Le Conseil d'État a estimé que l'éventualité de «jouer un spectacle différent» n'avait «pas d'incidence sur la légalité» de l'interdiction.

La justice n'a pas encore été saisie par les avocats de l'humoriste concernant une autre interdiction, décidée vendredi soir par la préfecture de police de Paris pour des spectacles programmés de ce samedi à mercredi prochain au théâtre de la Main d'Or.

Le nouveau spectacle de Dieudonné, que ce dernier évoquait dès vendredi soir sur sa page Facebook, parle d'Afrique et s'inspire de «mythes ancestraux» et de «croyances primitives». Son affiche représente un éléphant dans la savane. Il parle de «la position de l'Afrique dans le monde, de son histoire» et des «ancêtres» de l'humoriste, né il y a 47 ans d'un père camerounais et d'une mère bretonne.

Au cours de précédentes représentations du Mur, Dieudonné s'est livré à des attaques contre des personnalités juives.

«Je ne laisserai plus jamais, plus rien passer des mots qui divisent les Français», a martelé le ministre de l'Intérieur Manuel Valls. «J'ai déclenché un mouvement parce qu'il y avait une forme d'impunité qui me révoltait», a-t-il encore dit.

Selon un sondage BVA pour iTélé-CQFD, 83 % des Français ont une mauvaise opinion de Dieudonné, mais 74 % des personnes interrogées pensent que le gouvernement parle «trop» de cette affaire, une courte majorité (52 %) étant hostile aux interdictions des spectacles.