Après s'être taillé au fil des années une place en tant qu'humoriste autour des thèmes de la diversité, du choc culturel et de l'intégration, Boucar Diouf revient avec un nouveau spectacle intitulé Pour une raison X ou Y dans lequel il a choisi d'aborder l'être humain comme animal biologique.

Il a mené les vaches de son père dans la savane toute sa jeunesse en appelant chaque plante, oiseau et insecte par son nom. Une passion dont Boucar Diouf va faire un métier en étudiant la biologie à l'Université de Dakar. «Mes parents sont des cultivateurs et je fais partie d'une famille très recomposée avec les vaches, les chèvres, les moutons et les poules! Quand je suis venu ici, l'eau m'a fasciné, et j'ai fait mon doctorat en océanographie à Rimouski», dit-il.

Comblé par l'enseignement, Boucar a décidé de créer un spectacle avec lequel il pourrait faire rire les gens tout en leur transmettant son savoir.

«L'humain a hérité d'une génétique extrêmement vieille qui partage beaucoup avec celle du singe. On peut apprendre beaucoup sur les relations hommes-femmes juste en regardant la génétique sous l'angle de la biologie», explique-t-il.

L'humoriste 100% darwinien d'origine musulmane se base donc sur la science pour expliquer tout au long de son spectacle à son fils de 6 ans, puis au public, les mystères de la reproduction et de la séduction.

«Je crois à l'évolution des espèces. On ne peut pas étudier les sciences de l'évolution, en faire un doctorat et une passion et continuer pour autant à croire que la terre a 6000 ans. Je pense que quelque chose a créé tout ça, mais pas la main d'un grand seigneur en sept jours. Ça serait trop facile!», lance Boucar Diouf.

C'est à travers les parades nuptiales des oiseaux et leurs couleurs chatoyantes que le conteur aborde la séduction, et grâce au statut de cueilleuses à l'ère de l'homme des cavernes qu'il explique le sixième sens féminin.

«Avec l'évolution des grands singes, l'homme a hérité de la vision trichromatique. Comme la femme était en charge de la cueillette, elle a développé une distinction des couleurs plus puissante que l'homme. Elle a une longueur d'avance pour la distinction des teintes comprises entre le rose et le rouge et c'est comme ça qu'elle a développé son sixième sens, devinant les émotions en remarquant les changements de couleur du visage provoqués par la vasodilatation. Ça a fait peur à l'homme qui les a même accusées d'avoir des pouvoirs!», précise Boucar.

À travers le plaisir, la fécondation, la grossesse et l'accouchement, l'humoriste revient sur les mythes inventés par les hommes en grande partie motivés par l'incertitude de leur paternité.

«Ce qui nuit le plus à la femme, c'est le fait que l'homme ne puisse pas dire «C'est mon enfant», puisque chez la femme, l'ovulation est cryptique. Si elle était perceptible, les hommes feraient comme les orignaux et retourneraient dans le bois! L'homme a donc décidé de contrôler la femme et d'inventer le mariage, bien avant les religions», lance-t-il.

Avec Pour une raison X ou Y, Boucar Diouf promet de faire rire, mais aussi d'inviter son public à un véritable voyage poétique supporté par des projections.

«Je suis fier de mon spectacle et je crois qu'il est loin d'être banal. Les textes sont bien ficelés, grâce à mon ami Louis-François Grenier avec qui je travaille. Il est capable de rentrer dans mon cerveau!», dit Boucar.

Projets à venir

Parallèlement à l'écriture de son spectacle, Boucar Diouf a rédigé un livre dans lequel il a choisi de s'adresser aux adolescents pour leur expliquer les relations hommes-femmes.

De retour à l'animation d'Océania à partir du 7 janvier prochain sur Explora, Boucar planche sur un projet d'émission de télé dans laquelle il souhaite faire de la science grand public.

Pour une raison X ou Y, les 14, 15 et 16 novembre au Gesù et en supplémentaires les 13, 14 et 15 mars 2014.

Boucar au musée

Chassez le naturel et il revient au galop. Alors que La Presse a donné rendez-vous à Boucar Diouf au musée Redpath d'histoire naturelle de l'Université McGill pour parler de son nouveau spectacle, le docteur en océanographie en lui n'a pu s'empêcher de nous donner un petit cours de biologie. Un texte de Josée Lapointe.

1-Les bélugas du Saint-Laurent

«Les crânes de bélugas qu'on retrouve jusque dans les champs sont des fossiles de la mer de Champlain, ancêtre du Saint-Laurent. Ils datent d'il y a 12 000 ans, quand la mer s'est retirée et a généré le fleuve Saint-Laurent. Les bélugas sont restés là et j'ai écrit un livre sur eux, Le brunissement des baleines blanches, pour expliquer que cet animal est un indicateur du fleuve. Ça m'émeut beaucoup, car c'est un animal que j'aime et qui a le plus gros taux de cancer.»

2-Le Prince de Miguasha

«Le coelacanthe est un fossile vivant qui ressemble un peu à un autre fossile appelé le Prince de Miguasha. On sait que la vie a commencé dans l'eau il y a 3 milliards d'années. Au cours de l'évolution, certains animaux ont dû quitter la mer pour coloniser la terre ferme. Le prince Miguasha vieux de 380 millions d'années qu'on voit dans les vitrines du musée serait un des représentants de ce passage entre la vie marine et la vie terrestre.»

3-Le pigeon migrateur

«Pour moi, c'est le plus grand génocide animalier de la planète. Les Québécois l'appelaient la tourte. Certains pensent que c'est la viande qu'on retrouvait dans les tourtières ! Le dernier pigeon migrateur est mort le 1er septembre 1914 dans un zoo de Cincinnati. C'était la plus grosse concentration d'oiseaux en migration sur la planète. On leur reprochait de gâcher les récoltes aux États-Unis, alors ils ont été exterminés. Ça donne une idée de ce que les humains sont capables de faire...»