Il n'y a pas d'école de l'humour en France. Ce sont des écoles de théâtre et des conservatoires d'art dramatique qui forment les aspirants humoristes. Ces dernières années, le Comedy Club de Jamel Debbouze s'est ajouté aux lieux de formation. L'École nationale de l'humour du Québec est donc une institution unique en son genre. D'où l'intérêt des artistes français.

«En France, l'humour n'est pas considéré comme un art, dit Christopher Reggiani, qui termine sa première année à l'ENH. Quand tu commences, il faut même souvent payer pour jouer alors qu'ici, c'est le contraire.»

Son confrère Alban Jouvin ajoute que l'ENH lui apporte beaucoup. «Ma progression a été rapide, car on nous pousse à progresser et on est formé par des gens du métier qui sont souvent de futurs employeurs potentiels», dit-il.

C'est cet aspect qui a attiré Benjamin Picaud, un diplômé de 2012. Il suivait des cours de comédie en France en 2010 quand il a rencontré deux professeurs de l'ENH, Dominic Anctil et Benoit Pelletier, lors de trois jours de formation organisés par l'École dans les locaux de Juste pour rire à Paris. «J'ai eu un coup de foudre pour leur méthode d'enseignement très portée sur la pratique, les aides à la créativité et les procédés humoristiques», dit-il.

L'expertise de l'ENH fait donc des petits. L'École a commencé à donner des formations au Canada. Il y a aussi le projet d'École en Haïti. La France lui apporterait donc un rayonnement encore plus important.

«Le 25e anniversaire a pris toutes nos énergies cette année, mais on souhaite s'afficher plus largement qu'au Québec, dit Louise Richer, directrice générale de l'École. On a même failli avoir un élève camerounais l'an prochain, mais il n'a pas pu sortir du pays. Une École en France, ça fait partie des réflexions, mais ça dépend aussi des ressources. On commence à peine à parler de développement de l'École... Mais le canal existe entre la France et le Québec. Et c'est plus vrai que jamais.»

Il y a déjà eu un embryon d'école québécoise de l'humour en France en 2008, mais ça n'a pas duré. «Quand Juste pour rire l'a fondée, dit Gilbert Rozon, nous avions eu le soutien du gouvernement fédéral pour la démarrer, mais il a ensuite fallu l'autofinancer, ce qui a été tout un défi. En France, c'est sûrement possible [de créer une école], mais il nous faut un partenaire et un meilleur climat politique.»