C'est un Peter MacLeod en forme qui est monté mercredi soir sur les planches du Saint-Denis pour la première de son quatrième one-man-show, Sagesse reportée. On y allait un peu à reculons, n'ayant pas beaucoup aimé son précédent spectacle, 3e Round. Mais voilà, sans rien sacrifier à son style baveux, MacLeod est de retour dans ses zones de confort, en très bonne maîtrise de ses sujets de prédilection.

Contrairement à son dernier spectacle où il ne cessait de dire, plutôt inquiet, qu'il allait retrouver son titre de l'humoriste le plus trash, MacLeod est moins en mode provocation qu'en mode MacLeod, finalement. Pourquoi en faire plus quand on le faisait bien? Le point de départ de son nouveau matériel est qu'à 40 ans, c'est «trop tôt pour être vieux». Certes, il y a moins de condoms et plus de glucosamine dans ses bagages en tournée, mais ce n'est pas une raison pour devenir obligatoirement plate. Et ses exemples de ces gens angoissés qui veulent vieillir trop vite sont vraiment hilarants. Le numéro d'ouverture est peut-être le plus fort du spectacle, très bien suivi par un numéro sur le matriarcat, pas vraiment macho, mais assez révélateur de l'infantilisation dont nous sommes tous victimes dans une société un peu trop maternelle, protectrice jusqu'à l'absurde.

On a beau vouloir ne pas vieillir trop vite, il y a des faits qui ne trompent pas. MacLeod, en répétant sans cesse «dans mon temps», parle finalement comme tous les «mononcles» de tous les temps. De croire que «c'était mieux avant» trahit toujours l'âge de celui qui fait de telles affirmations. Mais on ne peut contredire MacLeod sur certaines névroses actuelles incompréhensibles pour qui a un peu d'expérience de la vie. Oui, comment comprendre ces «enfants-rois» qui tombent dans les pommes au premier coup de plume dans une bataille d'oreiller, et qu'on doit ranimer avec deux ou trois jets de Ventolin? Sans oublier que de nos jours, note-il, on peut prendre en otage une garderie simplement avec un sac d'arachides, les allergies étant tellement répandues.

Certains numéros étaient plus faibles, non dans leur efficacité mais dans leur originalité, notamment sur le couple, sujet très éculé qu'il n'a pas éclairé davantage que des dizaines d'autres humoristes. Il a cependant trouvé un angle intéressant en confessant, après 20 ans de blagues sur le sexe - «Je suis l'ambassadeur des jokes de pets de nounes» dit-il -qu'il n'est pas aussi hot que ça dans ce domaine. C'est un hypocondriaque doublé d'un dédaigneux. Sa liste des «turn-off» est longue pour un humoriste agressé par des groupies prêtes à tout pour l'impressionner.

Assagi, MacLeod? Pas du tout. La vulgarité qu'on lui reproche souvent n'est pas une posture, c'est une manière naturelle de s'exprimer, qu'on aime ou pas. À l'inverse du «gros cave» de Jean-François Mercier, il ne joue pas un personnage. Il n'a jamais été un grand orateur, ses failles apparaissent quand il devient sérieux, quand il veut passer un message ou quand il tente d'être émotif. D'ailleurs, et c'est probablement la nervosité de la première, il a plutôt «garroché» les dernières lignes de son spectacle qui s'était pourtant très bien déroulé. Cet humoriste n'est manifestement pas à l'aise avec le décorum. Mais il se trompe rarement quand il veut simplement faire rire, ni plus, ni moins. Et c'est surtout ça qu'il propose avec Sagesse reportée. Après tout, la plupart de ses fans, en allant le voir sur scène, n'ont pas d'autre désir que de reporter la sagesse à plus tard et rire un bon coup.