De passage à Los Angeles pour faire avancer sa carrière d'acteur, le Québécois Samir Khullar, alias Sugar Sammy, en a profité pour monter sur les planches des cabarets d'humour de la ville. Avec succès, rapporte notre correspondant.        

Le public composé d'une soixantaine de personnes réunies au Comedy Store d'Hollywood, lundi soir dernier, commençait à regarder l'heure. Les humoristes se succédaient et leurs blagues prévisibles sur la vacuité de Facebook, l'imprévisibilité des filles et la longueur du membre des hommes provoquaient des rires sans conviction.

Puis Sugar Sammy a pris le micro.

«Bien des gens pensent que je suis arabe, dit-il. Quand je suis dans un avion, je vais toujours voir un Arabe après le décollage. Je vais le saluer, bien fort. Après ça, on se met à prier dans l'allée. L'avion a déjà décollé. On peut avoir du fun.»

Les Canadiens et les Québécois connaissent l'humour direct de Sugar Sammy. Pour les Américains, par contre, c'est une découverte. Pas que les humoristes aux États-Unis évitent les sujets controversés, mais peu prennent autant plaisir à repousser les limites que Sugar Sammy.

En entrevue dans un bar près de l'appartement qu'il loue à L.A., Sugar Sammy dit chercher consciemment à provoquer son public.

«Aux États-Unis, chaque État est différent, dit-il. Par exemple, à New York ou L.A., les gens sont capables d'en prendre. Ils savent rire d'eux-mêmes. Ailleurs, c'est moins évident. Je dois d'abord démontrer que je suis capable de rire de moi pour avoir leur attention.»

À Los Angeles depuis le début du mois de février, l'humoriste de 35 ans profite de chaque instant pour faire avancer sa carrière. Il va à des auditions, prend des cours d'art dramatique au réputé Margie Haber Studio, et meuble ses rares temps libres avec des numéros de 10 ou 15 minutes au Comedy Store, L.A. Improv, Laugh Factory et autres cabarets d'humour de la ville.

«Mon but, c'est d'évoluer comme artiste. J'aimerais ça trouver des rôles dramatiques à la télé ou au cinéma. L'humour est une chose que je maîtrise bien, que je fais depuis 15 ans.»

Au Canada, son nouveau DVD lancé en janvier, Sugar Sammy Live in Concert: Direct From Montreal se vend bien. Cela dit, l'humoriste refuse de faire du surplace, de trouver une formule facile et de l'utiliser pour faire avancer sa carrière.

«Je ne veux pas être au même niveau dans cinq ans. Quand je regarde sur YouTube les blagues que je faisais il y a cinq ans, je suis gêné. C'est mauvais! Sur un show d'une heure, il y a peut-être un ou deux gags que j'aime encore.»

Sammy dit être un grand fan de Ricky Gervais, Larry David et Sacha Baron Cohen. Plus jeune, il restait chez ses parents le vendredi soir pour ne pas manquer un épisode du Ali G Show, animé par Cohen.

«Ce gars-là me fait mourir de rire. Mes amis m'appelaient pour sortir, mais je ne voulais rien savoir. Et Ricky Gervais est un héros personnel. Sa performance aux Golden Globes était mémorable, c'est un classique.»

Le Québec avant tout

Né à Montréal de parents originaires du nord de l'Inde, Sammy dit être un pur produit du Québec. Le fait qu'il maîtrise quatre langues (le français, l'anglais, le panjabi et l'hindi) lui permet de mener sa carrière sur plusieurs continents.

Malgré tous ses voyages, il n'est pas prêt à quitter Montréal. «Il y a un point de vue unique au Canada, à Montréal. C'est là que je veux habiter.»

Le comédien est d'ailleurs en contact constant avec ses parents sur Skype. «Mes parents, ce sont mes amis. Ils me manquent quand je suis en voyage. On échange sur Skype au moins tous les deux jours. Je crois que c'est un truc d'immigrants, la famille est très importante.»

Sammy est aussi en train d'écrire du matériel pour une éventuelle tournée canadienne. «Ce n'est pas encore prêt. C'est long, car tout mon matériel doit être nouveau. Quand je fais des spectacles aux États-Unis, personne ne me connaît, alors je peux utiliser mes grands succès.»

Au Canada anglais, sa carrière est bien établie. Au Québec, toutefois, il reste encore un humoriste qui travaille en marge des figures établies.

Une situation qu'il compte changer en entreprenant une grande tournée québécoise en 2012. «Je veux aller partout au Québec. C'est important pour moi de faire carrière au Québec, car c'est ma province natale, c'est chez moi.»

Au cours des prochains mois, Sugar Sammy jongle avec quelques projets pour la télé québécoise, qui ne sont pas encore confirmés. Il doit aussi prochainement s'envoler pour Singapour, où il animera une soirée durant laquelle joueront Stone Temple Pilots et Slash, l'ancien guitariste de Guns N' Roses.

«L'Asie est un univers dont on n'entend pas souvent parler, dit-il. Je crois que ça intimide bien des gens. Pour moi, c'est naturel d'y aller. Là-bas, les spectateurs me voient comme un étranger et pensent que je suis un peu perdu. J'aime les surprendre quand ils s'y attendent le moins.»

photo pénélope fortier, collaboration spéciale

Sugar Sammy est peut-être en Californie, mais Montréal et le Québec restent bien ancrés dans sa tête. Il y caresse des projets pour 2012. «Je veux aller partout au Québec. C'est important pour moi de faire carrière au Québec, car c'est ma province natale, c'est chez moi.»