Depuis Les Plouffe, le thème de la famille est une valeur sûre au Québec. Un filon inépuisable et increvable - au cinéma, à la télé et en humour- dans lequel creuse lui aussi Philippe Bond, jeune humoriste un peu Tanguy sur les bords, dans son premier one-man-show, J'ai confiance en moi.

Pour rejoindre le public québécois, Rachid Badouri l'avait bien compris, cette obsession de la famille, lui qui a fait de son père le personnage le plus connu de sa galerie. Philippe Bond compte bien nous imposer Robert. Robert Bond, son père. Et si la mère de Rachid fait des crêpes berbères, la mère de Philippe Bond, elle, est une experte des brownies - dessert qu'elle fabrique sans cesse pour détendre l'atmosphère dans sa famille de fous, ce qui signifie qu'elle doit en faire beaucoup.

Philippe Bond aime son père et sa mère. De même que son frère et sa soeur. Et sa grand-mère. Et son mononcle. Et ses neveux, qu'il aime garder parce qu'ils peuvent enfin s'amuser sans se faire pincer par les adultes - Bond trouve d'ailleurs qu'on vieillit trop vite, et s'ennuie de ses «niaiseries» d'enfance, comme «faire du courant» dans la piscine, jouer à la cachette et surtout, commettre des coups pendables.

Comme humoriste, Philippe Bond fait partie de la famille des conteurs. Il soutient une filiation avec Michel Barrette ou Jean-Marc Parent, et cela est vrai. On n'est pas dans le one-liner ici, le comique réside principalement dans les situations racontées avec enthousiasme par l'humoriste. Comment on vit à 27 ans chez des parents qui sont chauds lapins et qu'on surprend dans le plus simple appareil; comment on supporte un père capable de s'insérer dans un party VIP de Star Académie sans avoir été invité, capable de casser la gueule aux voleurs de ses voisins et de fabriquer une jolie cabane pour laisser son fils avoir du fun avec les petites voisines à l'insu de maman; comment on tente d'être aussi amusant avec ses neveux que l'est ce père qu'on aime tant. Ce père qui posait des «post-it» partout dans les affaires de Philippe Bond, quand il était enfant et angoissé, ayant pour seule phrase: J'ai confiance en moi. Et puis le voilà sur la scène du Saint-Denis...

On l'aura compris, on est dans cet humour qui décortique le quotidien, plutôt «maintream», sans faute de goût, dans lequel le vaste public se reconnaît. L'ironie de la chose, en fait, est que Philippe Bond nous présente sa famille comme étant «très spéciale», alors qu'elle correspond parfaitement à l'idée commune que l'on se fait de la famille québécoise. Ce père qui ne comprend rien au téléphone, cette mère toujours un peu inquiète pour ses enfants et exaspérée par les pitreries de son mari, ça se passe dans bien des familles, finalement. Mais, on le sait bien, c'est toujours sa famille qui est la meilleure - lire la plus drôle.

À défaut d'apprendre et de voir quelque chose de nouveau, il reste la performance de Philippe Bond, assez irréprochable. Le gars sait raconter ses histoires, et cela, presque sans support musical ou visuel. Seul sur scène avec son texte, il recrée l'ambiance d'une soirée entre amis où il vole la vedette avec ses anecdotes. Et les gens voudront l'avoir pour ami.

Enfin, c'est toujours extrêmement touchant de voir un jeune humoriste faire son Saint-Denis pour la première fois, la salle remplie de journalistes (les méchants), de collègues humoristes (soutien moral), ainsi que des amis et, bien sûr, de la famille (soutien indéfectible). En sortant, on a eu droit aux fameux brownies de Madame Bond. Mais ça, personne n'a le droit de critiquer les brownies d'une maman, qui sont toujours bons. Ou Bond...

J'ai confiance en moi de Philippe Bond, ce soir, 20h, au Théâtre Saint-Denis. Supplémentaires les 29 et 30 avril 2011. Pour tout savoir de la tournée au Québec: www.evenko.ca.