L'humoriste et candidat «antisioniste» aux élections européennes Dieudonné a délaissé sa campagne électorale pendant deux jours pour venir faire la promotion de son nouveau spectacle, Sandrine, qu'il présentera aux Montréalais en juin.

Du spectacle, il sera peu question au cours de la conférence de presse peu courue par les journalistes hier. Traitant de la violence conjugale, Sandrine, la suite du Divorce de Patrick, «n'est pas un spectacle à caractère fondamentalement politique, mais social», dit-il.

Quelques minutes plus tard, le sujet du spectacle est expédié et c'est de l'engagement politique de l'homme dont il est question. Dieudonné s'attendait aux questions sur ce qu'il nomme modestement «son actualité en France». L'homme, visiblement fatigué, répond poliment aux journalistes. Le ton est las; le discours, désincarné.

Par ses habituels tours de passe-passe, Dieudonné récuse les qualificatifs ou garde des distances en façade avec ses colistiers connus pour leur extrémisme, Alain Soral ou Ginette Skandrani. «Nous avons chacun des parcours, des histoires, moi je fais des spectacles humoristiques sur la relation homme femme», répond Dieudonné.

En 1997, il s'est présenté aux élections législatives contre l'extrême droite. «Aujourd'hui, c'est contre tous les partis», lâche-t-il. À la façon d'un Jean-Marie Le Pen, il voit des lobbies partout: «le lobby sioniste, raciste, fasciste et impérialiste» qui domine le «lobby politico-médiatique» français. Sans oublier la «logique libérale américano-sioniste qui tient la planète».

Rattrapé par la polémique à Montréal, où il a été condamné pour avoir qualifié Patrick Bruel de «militaire israélien», Dieudonné joue la carte de l'innocence, voire de l'ignorance: il n'était pas au courant de la procédure. «Il y a une procédure en suspens. Je pense que c'est par le dialogue judiciaire, qui me paraît très sain, que cela va se résoudre», dit-il.

À Montréal, contrairement à plusieurs villes de France, Dieudonné n'a pas eu de mal à louer une salle. Il n'aura pas besoin d'affréter le bus Rosa Park, nommé en référence à la militante noire américaine, dans lequel il se produit en France. «Elle s'est battue pour sa liberté de mouvement: moi, c'est pour ma liberté d'expression», prétend-il.

Dieudonné ne croit pas que ses sorties politiques ont sapé sa popularité. «C'est le rôle de l'humoriste de provoquer des réactions. Le rôle du bouffon, à la cour des rois, était de faire rire sur des tabous profonds. Parfois, on lui coupait la tête. Aujourd'hui on lui coupe le micro. Je ne me considère pas comme une victime mais comme un humoriste qui fait son travail», dit-il, avant de repartir pour la France et la campagne européenne.