À la télévision, Criss Angel a marché sur le lac Mead et s'est fait écraser par un bouteur. Impossibles à recréer en salle, ces illusions à grande échelle bénéficient de la «magie» du montage.

Sur scène, la marge de manoeuvre de l'illusionniste s'évapore. Soudainement, il n'existe plus d'écran entre l'oeil du spectateur et lui. C'est encore plus vrai lorsqu'il se donne pour mission de faire disparaître les boîtes qui font traditionnellement partie de ce type de numéros. C'est le défi que Criss Angel et le Cirque du Soleil ont cherché - et en partie réussi - à relever avec Believe, présenté en première mondiale vendredi soir, à Las Vegas.Déterminés à réinventer le spectacle de magie, comme le Cirque du Soleil l'a fait pour le cirque, Criss Angel et le metteur en scène Serge Denoncourt ont concocté, avec Believe, une production loin des clichés de cet art. En sortant littéralement la magie de sa boîte et en la frottant à d'autres formes d'expression comme la musique, la danse et la projection vidéo, ils convient le spectateur à un spectacle d'une beauté rarement égalée en magie.

D'entrée de jeu, on est entraîné dans un univers à des lieues de celui qui a fait la gloire du Cirque du Soleil depuis 25 ans. S'ouvrant telle une version live de l'émission Mindfreak, qui a contribué à la popularité de Criss Angel aux États-Unis, Believe s'annonce comme un commentaire du magicien, micro à la main, sur ses exploits les plus célèbres projetés sur grand écran.

C'est du moins le cas jusqu'à ce que le New-Yorkais à l'allure de rockstar reçoive une violente décharge électrique qui le propulsera, de même que le public, dans un monde imaginaire fusionnant les univers diamétralement opposés du Cirque, ancré dans la réalité de l'acrobatie, et de l'illusion.

Personnages attachants

Inspiré de l'esthétique gothique du magicien, Believe évoque, par les incroyables costumes de Mérédith Caron, les chorégraphies déjantées de Wade Robson (So You Think You Can Dance), les éclairages sensuels de Jeanette Farmer et la musique omniprésente d'Eric Serra (Le grand bleu, Le cinquième élément, La femme Nikita, etc.) un théâtre délabré et peuplé de personnages plus attachants les uns que les autres.

Qu'on pense à ces cinq placeurs un brin négligés, aux deux femmes d'Angel, la douce Kalaaya et la froide Crimson, ou encore à ce peuplement de lapins créés par le talentueux Michael Curry, tout ce petit monde permet de lier entre elles une suite ininterrompue d'illusions.

Si celles-ci risquent de décevoir les inconditionnels de Mindfreak en raison de leur échelle réduite, elles devraient impressionner les amateurs de magie par la relecture qu'elles offrent de tours classiques comme l'apparition et la disparition.

Il n'y a rien d'original, bien sûr, à couper un homme en deux ou à transformer des mouchoirs en colombes. Mais y parvenir sans les habituelles boîtes truquées, sans les écrans de fumée et sans les fondus au noir qui sont le propre de la magie traditionnelle, ça relève du défi.

Le spectateur doit aimer la personnalité de l'exubérant Criss Angel pour apprécier ce spectacle inspiré en partie de sa propre vie. Il est partout et nulle part à la fois dans cette production.

Believe tiendra l'affiche du théâtre de l'hôtel Luxor, à Las Vegas, pour les 10 prochaines années.