Manuel Roque n'est pas à proprement parler un nouveau visage en danse. En tant qu'interprète, il a marqué les esprits au sein de la Compagnie Marie Chouinard. C'est plus récemment qu'il s'est fait connaître en tant que chorégraphe par un public plus large. Toujours en questionnement, Roque sonde son identité créatrice en refusant les voies tracées d'avance. Retour sur le chemin parcouru.

CIRQUE ORCHESTRA - CIRQUE ÉLOIZE (1999)

Originaire de France, Manuel Roque est débarqué à Montréal pour poursuivre une formation en acrobatie aérienne à l'École nationale de cirque. Il participe à Cirque Orchestra, le tout premier spectacle créé par le Cirque Éloize.

« Mon Dieu... Je ne pourrais plus faire ça [en voyant la finale où il se lance dans le vide]. J'ai arrêté l'École pour aller faire la tournée. C'est ce qui m'a permis de rencontrer Peter James, Lucie Vigneault, Alain Francoeur (qui signait la mise en scène) et Johanne Madore. Je regardais ces quatre-là qui travaillaient en performance, en théâtre, en danse, et j'ai capoté. C'est à ce moment que j'ai commencé à suivre des cours de danse. »

ORPHÉE ET EURYDICE - COMPAGNIE MARIE CHOUINARD (2008)

Manuel Roque est engagé par la Compagnie Marie Chouinard pour remplacer le danseur David Rancourt, dont il reprend les parties au pied levé, notamment dans Body-Remix/Goldberg-Variation. En 2008, il participe à la création d'Orphée et Eurydice.

« Marie m'a fait confiance, j'ai été sur scène très rapidement... C'est moi qui faisais cette partie ? Je ne m'en souvenais même pas... Il y avait souvent des changements [rires]. [...] J'ai rencontré des gens exceptionnels comme Carol Prieur ; des gens qui étaient toujours en état de recherche. C'est sûr que mon travail avec Marie a posé des bases. Il y a des choses qui ne partiront jamais. »

RAW-ME - MANUEL ROQUE (2010)

Après trois années à tourner avec Marie Chouinard, Manuel Roque quitte la compagnie. Il a besoin d'une pause, mais il a aussi envie de créer. RAW-me, un solo « d'autofiction », est créé par un interprète en quête de son identité artistique.

« Ce solo est un peu la réponse à un questionnement sur mon engagement artistique ; une façon de jeter un pavé dans la mare. Il y avait là une simplicité qui me faisait beaucoup de bien après la pression d'une compagnie internationale. Aujourd'hui, je vois dans cette création tous les défauts d'une première pièce. Mais on voit aussi poindre une certaine physicalité. »

NE MEURS PAS TOUT DE SUITE, ON NOUS REGARDE - MANUEL ROQUE (2012)

Manuel Roque possède une grâce naturelle et une présence remarquable sur scène. Les gens s'attendent à ce qu'il utilise ses talents dans ses créations, mais le chorégraphe refuse de suivre la voie qui s'imposerait dans cette seconde oeuvre, un duo avec sa complice Lucie Vigneault.

« Les gens voulaient me voir danser et j'ai décidé qu'on ne danserait pas, Lucie et moi ! On a essayé plusieurs trucs, puis, au bout de quelques mois, j'ai dit à Lucie : "Les belles chorégraphies, les comptes... on les oublie ! On travaille ces deux énergies brutes, celles de deux enfants qui jouent." Autant c'est magnifique et plein de grâce, autant c'est violent. Il y a des gens qui ont détesté... et d'autres qui ont adoré. »

DATA - CIE MANUEL ROQUE (2014)

Présenté d'abord à l'Usine C, Data est un solo à la physicalité exacerbée, où Roque donne à voir toute sa virtuosité. Sa programmation au FTA 2015 a été une consécration. La pièce correspond à la création de la Cie Manuel Roque.

« C'était une vraie surprise de me faire inviter au FTA ; j'étais naïf et surtout terrorisé ! [...] Avec Data, je désirais retrouver ce qui est à moi, repousser les influences extérieures. Mais après des mois de travail, je me suis rendu compte que c'est avec ces influences qu'on se construit. Tout l'acharnement que j'avais à trouver une signature physique kinesthésique, eh bien, cette question a tout à coup perdu son importance ! Il me suffisait de bouger et d'être moi-même. »

4-OR - CIE MANUEL ROQUE (2015)

Il s'agit pour Manuel Roque d'une toute première chorégraphie où il ne danse pas (et où il s'est découvert un côté control freak). Minimaliste, voire radicale, la pièce pour quatre danseurs (dont Lucie Vigneault), présentée par Tangente au début de décembre, est très loin de Data.

« Certains sortent de là et adorent ; d'autres veulent nous tuer ! Oui, j'exagère ! [...] Dans ce cas-ci, je sentais que ça prenait une prise de position radicale. Pour moi, c'était aussi une façon de me désinvestir d'un besoin de plaire à tout prix, même aux diffuseurs qui attendaient une "suite" de Data. C'est important pour moi de prendre des risques. J'ai besoin de savoir que je peux tout perdre pour faire ce métier-là. »

PROCHAIN RENDEZ-VOUS : 2017

En vrai « boulimique », Manuel Roque a déjà posé les assises de sa prochaine création, qui sera très physique et athlétique. Un diffuseur montréalais est associé au projet, qui sera présenté en 2017 à Montréal. Impossible d'en savoir plus pour le moment, sauf que le chorégraphe y dansera en compagnie de Lucie Vigneault et Sophie Corriveau, qui étaient toutes deux dans 4-OR. À suivre !

PHOTO FOURNIE PAR LE CIRQUE ÉLOIZE

Un artiste du spectacle Cirque Orchestra présenté en 1999 par le Cirque Éloize.