Le Ballet national du Canada revient à Montréal pour la première fois en cinq ans. Sa célèbre directrice artistique Karen Kain en est fort heureuse, mais elle demeure lucide sur l'état de la danse au pays.

L'ancienne danseuse étoile et présidente du Conseil des arts du Canada, aujourd'hui directrice du Ballet national du Canada (BNC), Karen Kain, verte sexagénaire, n'a aucunement l'intention de prendre sa retraite.

Pour l'instant, elle est heureuse de revenir avec le BNC à Montréal, pour la première fois en cinq ans, y présenter trois ballets contemporains. « Je suis très reconnaissante envers Pierre Des Marais et Danse Danse de nous ramener à Montréal. »

Le programme triple du BNC comprend des oeuvres qui ont reçu un accueil critique très favorable déjà : The Second Detail (1991) de William Forsythe, Spectre de la rose (2009), version de Marco Goecke, et Chroma (2010) de Wayne McGregor.

« Plusieurs artistes créent en se rebellant contre le ballet classique, explique la directrice artistique. Mais il y a beaucoup de chorégraphes, comme ceux-ci, qui cherchent à repousser les limites du ballet. Cela veut dire qu'il y a un avenir, voire une nouvelle ère pour le ballet contemporain. »

Le BNC ne serait toutefois pas rentable s'il ne faisait que du ballet contemporain, avoue-t-elle. La troupe compte sur son Casse-Noisette et d'autres spectacles à grand déploiement pour rentabiliser ses activités.

« Mais les trois pièces de Montréal permettent de montrer l'incroyable éventail des danseurs de ballet classique à notre époque. Ils peuvent passer du Lac des cygnes à ces oeuvres utilisant une tout autre approche. »

Dix ans

Karen Kain est chez elle au Ballet national du Canada. Elle y est entrée en 1969 et y a mené une carrière exceptionnelle. Depuis 10 ans maintenant, elle occupe la position de directrice artistique.

« Personnellement, tout ce que je souhaitais s'est réalisé. Je touche du bois. Je suis très chanceuse de diriger le Ballet à ce moment-ci de son existence. » 

Sa longue expérience lui aura permis de relancer l'institution, selon les observateurs de la scène torontoise.

« Je me suis souvenue de tout ce que j'ai reçu au sein de cette compagnie dans les années 70. J'ai travaillé avec de grands chorégraphes et créé des oeuvres magnifiques. C'est ce que j'essaie de perpétuer. »

Budgets

Même si le BNC peut compter sur les mécènes et un fonds consacré aux nouvelles oeuvres, il ne peut plus se permettre de grandes tournées annuelles au Canada. 

« Les revenus aux guichets ne le permettraient tout simplement pas, dit-elle. Et personne n'a les reins assez solides pour nous faire venir. »

À moins d'un miracle, il sera donc impossible de voir à Montréal une production telle The Winter's Tale du chorégraphe britannique de renom Christopher Wheeldon, qui sera présentée en novembre à Toronto.

« Nous le présenterons à Los Angeles, à Washington et en Europe, mais ce sont les promoteurs américains qui paient notre voyage dans ces villes. » 

En outre, le BNC se présente à Montréal avec une trentaine de danseurs cette fois, la moitié de la troupe.

« C'est moins onéreux, avoue Karen Kain. Généralement, nous dansons avec un orchestre sur Spectre de la rose et Chroma, mais pas cette fois. Nous ne pouvions pas nous le permettre. C'est triste, mais c'est comme ça. »

Au Théâtre Maisonneuve les 1er, 2 et 3 octobre, 20 h. Blessé, le Québécois Guillaume Côté ne pourra pas danser, mais il participera à une rencontre publique après la représentation du vendredi.