Après avoir présenté Le lac des cygnes l'an dernier, le Ballet national d'Ukraine sera de retour à la salle Wilfrid-Pelletier à partir de jeudi, à l'invitation des Grands Ballets canadiens de Montréal, avec un autre grand classique: La bayadère.

Épris de la bayadère Nikiya, qu'il rejoint en cachette au temple, le guerrier Solor est promis à Gamzatti, fille du rajah. Trahie, celle-ci offre à Nikiya un bouquet de fleurs dans lequel est caché un serpent dont la morsure est mortelle.

Ce drame épique présenté pour la première fois au Théâtre Bolchoï, à Saint-Pétersbourg en 1877, se veut le reflet d'une Inde mystérieuse et de l'amour éternel. La version présentée par le Ballet d'Ukraine est celle créée par Natalia Makarova pour l'American Ballet Theatre en 1980. Aniko Rekhviashvili, directrice artistique du Ballet national d'Ukraine, et la première ballerine Natalia Matsak ont répondu à nos questions.

Vous souvenez-vous de la première fois que vous avez vu La bayadère?

Natalia Matsak: Nous avons la chance que La bayadère fasse partie du répertoire ukrainien depuis de très nombreuses années. En 1986, on a donné la version la plus récente de ce classique, celle qui est toujours populaire dans le monde entier. Ma carrière a pris son envol avec cette performance. J'ai interprété le monologue de Nikiya où elle danse avec un serpent. C'était une grande responsabilité, surtout pour une jeune fille. La mort, la tragédie et la spiritualité de ce rôle ne sont pas toujours faciles à saisir, même pour des danseurs plus matures. Depuis, j'ai pris l'habitude de prendre au sérieux le côté théâtral de mes personnages.

Aniko Rekhviashvili: Ma première impression a été la tristesse; cette impression de tristesse solennelle qui survient quand on rencontre la perfection, la pure beauté du ballet romantique. Pendant la scène du Royaume des ombres, notamment, où 32 ballerines tiennent l'arabesque. Ça nous fait pénétrer dans un monde surréel de fragilité.

Qu'est-ce que La bayadère signifie pour vous?

Natalia Matsak: Je pense que c'est l'une des plus belles acquisitions du ballet classique de tous les temps. Ce ballet est sans égal; malgré toutes les tentatives de le réinventer, il reste l'un des chefs-d'oeuvre les plus beaux et les plus spirituels de la danse classique.

Aniko Rekhviashvili: C'est la quintessence de la loyauté, de la sincérité des émotions et de la recherche d'un idéal dans un ballet. D'après moi, l'idée principale de ce ballet est le sacrifice de soi, et c'est sa valeur intrinsèque.

Est-ce que cette version est proche de l'originale?

Natalia Matsak: Les scènes principales sont, pour la plupart, les mêmes que dans la version originale. Mais j'aime que, dans sa version, Natalia Makarova donne plus d'importance à l'histoire d'amour entre Nikiya et Solor, en ajoutant une touche plus occidentale aux chorégraphies et à la plasticité des danseuses. Elle a également revu la mise en scène de tous les personnages en ajoutant un peu de vivacité dans leurs actions. Et, bien sûr, elle a ajouté un quatrième acte, le monologue de Gamzatti, qui n'aurait pas pu mieux exprimer sa personnalité.

Aniko Rekhviashvili: Natalia Makarova a conservé la structure des mythiques scènes de ce ballet classique, comme Le royaume des ombres, le pas de deux de Solor et Nikiya et le pas de trois. En même temps, des formes musicales et chorégraphiques plus larges ont été transformées de manière créative, revues dans un nouveau langage esthétique, avec une sensualité inhérente au style de Natalia Makarova.

Comment qualifieriez-vous la musique de Leon Minkus?

Natalia Matsak: La musique se marie de manière incroyable avec les images et la chorégraphie, ce qui ne laisse personne indifférent.

Aniko Rekhviashvili: Leon Minkus a créé 16 ballets avec la collaboration de Marius Petipa. Leurs deux plus grands succès ont été Don Quichotte et La bayadère. Leon Minkus avait saisi la finesse et la spécificité de l'art du ballet, et a créé un magnifique ballet romantique avec une très grande variété de thèmes musicaux.

Quelle est la particularité de la scénographie?

Natalia Matsak: En un mot: succincte.

Aniko Rekhviashvili: La scénographie de la version de Natalia Makarova est la plus intéressante et moderne de toutes, à mon avis.

À la salle Wilfrid-Pelletier, Place des Arts, les 20, 21 et 22 février.