La Chapelle présente, en ce moment, Drugs Kept Me Alive de l'artiste flamand Jan Fabre. Avec une énorme décharge physique et verbale, ce solo, créé pour le danseur américain Antony Rizzi, traite de maladie, de drogue et de mort avec une ironie sombre et savoureuse à la fois.

Dans ce récit à la première personne, Rizzi, affublé d'un bonnet pointu (celui de l'âne ou du sorcier, à vous de choisir), nous entretient de son combat contre une maladie jamais nommée. Combat qu'il mène, tambour battant, grâce à une orgie de médicaments et de drogues, sous ordonnances ou illicites. Mais surtout, il se vautre dans cette pharmacopée, source d'espoir, de luxure et de douleurs.

Sur une scène sombre, cintrée d'une multitude de flacons de pilules, Rizzi, sorte de savant fou aux traits de Woody Allen, officie avec une verve crûment poétique sur les effets des cocktails de drogues de sa composition. Les sensations qu'il en retire, il les raconte et il les danse. Le corps leste du danseur, pour qui la danse apparaît comme une drogue au même titre que la cocaïne, les poppers ou le sexe, se brise et lui échappe par instants. Le texte est savoureux, rempli de calembours et de grandes vérités lancées avec autodérision.

Si le personnage a quelque chose de vil et de lubrique, il est composé de manière à ce qu'on s'y attache d'emblée. C'est parce qu'il est charismatique, parfois même cocasse, mais surtout parce qu'il reste parfaitement lucide et franc tout au long de son récit. «Je me suis sauvé en m'empoisonnant», lance-t-il en fin de parcours.

Car si le récit de Rizzi prend parfois des allures de quête fantasmagorique, grâce notamment à une multitude de capricieuses bulles de savon, Drugs Kept Me Alive pose un regard pénétrant sur l'industrie de la maladie et de la mort et ses multiples contradictions.

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Drugs Kept Me Alive de Jan Fabre. Jusqu'au 9 novembre au théâtre La Chapelle. Info : 514 843-7738