La jeune chorégraphe montréalaise Virginie Brunelle en est à sa troisième création. Après des débuts au Studio 303, puis à Tangente, la voilà, jusqu'au 17 septembre, à l'affiche du Théâtre La Chapelle, salle très courue depuis que Jack Udashkin en assume la direction artistique. Brunelle signe cette fois Complexe des genres, un sextet pour trois femmes (Isabelle Arcand, Sophie Breton et Claudine Hébert) et trois hommes (Luc Bouchard-Boissonneault, Simon-Xavier Lefebvre et Frédéric Tavernini). Sujet: les relations de couple.

Dès les premiers instants, Complexe des genres accroche le regard grâce à un prologue fort: trois êtres, à demi couchés au sol, affublés de tutus, bougent de façon curieuse et particulièrement désarticulée. Et pour cause: les torses appartiennent à des femmes, les jambes à des hommes!

Virginie Brunelle raconte d'abord l'amour à bras-le-corps: couples qui se rentrent dedans comme des joueurs de football, femmes secouées, collisions répétées jusqu'à l'épuisement et parades et tours brutaux, rappelant parfois Édouard Lock, parfois Dave St-Pierre, entre autres. En effet, le vocabulaire choisi ici par Brunelle pour évoquer le mal d'amour en est un qui est très exploité en danse contemporaine depuis quelques années.

Cela dit, Brunelle dirige parfaitement les danseurs car malgré ces lieux communs, les relations humaines évoquées sonnent très vraies. On s'émeut à la vue de cette danse-vérité aux accents poétiques. Somme toute, à mesure que les tableaux de Complexe des genres défilent, les images construites par la chorégraphe ainsi que son vocabulaire se font plus personnels. On aime notamment que Brunelle emprunte au vocabulaire de la danse classique, en y insufflant un fini brut d'une facture qui lui est propre.

Dans sa courbe dramatique, Complexe des genres passe de l'affrontement à l'apaisement. Le partenaire devient refuge (idée évoquée notamment par un très beau trio masculin, bêtes esseulées dont LA femme apaisera la soif de tendresse). La danse se fait plus lyrique; le vocabulaire s'affine; Brunelle peaufine le détail d'une caresse, orchestre les regards, marque certains gestes choisis grâce aux accents de la musique, presque entièrement tirée du répertoire classique - inusité pour une jeune chorégraphe.

La fin frôle le happy endcliché; arrive à point nommé une soliste, qui se fracasse au sol à répétition. C'eût été une chute parfaite, qui souligne avec force que l'individu affronte seul la tourmente. Mais Virginie Brunelle choisit d'ajouter un dernier tableau, une jolie trouvaille, mais qui boucle Complexe des genres sur une note bonbon (si distanciation il y a, on ne la sent pas). Dommage.

Complexe des genres de Virginie Brunelle. Au Théâtre La Chapelle jusqu'au 17 septembre. Info: 514 843-7738