Vingt-sept ans après sa première tournée en 1984, les Grands Ballets Canadiens se reproduiront dans trois grandes villes chinoises jusqu'au 31 juillet. Au programme, la pièce fétiche de leur répertoire : Minus One d'Ohad Naharin. C'est l'occasion de démontrer la mutation résolument contemporaine de la compagnie montréalaise. Et de consolider des liens de réciprocité pérennes avec le public et le milieu professionnel chinois, lui aussi en pleine évolution.

Voilà une dizaine d'années que les GBCM poursuivent l'élargissement de leur auditoire international, multipliant les lieux de présentation au sein même de leurs marchés traditionnels aux États-Unis et en Europe. Mais surtout, d'année en année, et au gré d'un répertoire contemporain éclectique, leurs tournées deviennent de plus en plus nombreuses, et lointaines. Après les Étés de la danse à Paris en 2008, le Moyen-Orient en 2009 et la Biennale de Venise en 2010, ils vont visiter trois grandes villes, lieux culturels et artistiques prestigieux : Beijing, Dalian, Guangzhou. Deux représentations à chaque fois, dans des salles à la mesure du nombre de spectateurs.

Le directeur général Alain Dancyger commente : « Ce sera vraiment intéressant de voir comment le public chinois réagira à cette pièce contemporaine qui partout provoque l'enthousiasme, et les échanges, puisqu'une des sept parties du spectacle est une invitation au public à rejoindre les danseurs sur scène. On sait les Chinois réservés, on verra bien ! »

Selon lui, cette tournée démontre d'ores et déjà le succès de la politique de réciprocité qu'il a intensifiée ces dernières années : « Sans liens de réciprocité, on n'aurait pas les moyens de telles tournées, dit-il. Nous avions invité le Ballet de Guangzhou en 2010, la Chine nous invite, et nous réinviterons, très prochainement, une autre très grande compagnie chinoise à Montréal... »

C'est la confirmation qu'en cette période de coupures fédérales dans les budgets alloués aux tournées, les relations entre les milieux des arts et des affaires se doivent de demeurer étroites autant qu'inventives. On se souvient que c'est l'Égypte qui a sauvé la tournée des GBCM au Moyen-Orient (comme l'Italie a sauvé celle de La La La Human Steps en Italie à la même époque). La tournée chinoise a bénéficié d'un montant de 335 000 $ amassés en avril lors du gala-bénéfice présidé par Guy Hachey, président et chef de l'exploitation Bombardier aéronautique. Alain Dancyger se réjouit qu'à Beijing aussi les milieux chinois des affaires et de la politique aient déjà annoncé leur présence et leur intérêt.

Le public chinois serait, avec la fulgurante évolution économique et artistique connue par le pays, à la recherche de découvertes dans ce domaine. En danse particulièrement. Revenus à la danse classique après des décennies d'interdiction durant l'époque maoïste, les professionnels chinois sont maintenant soucieux de développer la danse contemporaine. De grands chorégraphes et danseurs existent déjà, mais ils résident et créent pour la plupart à l'étranger. En Chine, la révolution de la danse contemporaine est sur le point d'avoir lieu.

C'est dans ce contexte que les GBCM, qui présentaient en 1984 un programme néo-classique et sont devenus entre-temps une compagnie de création contemporaine, constituent un parfait exemple de l'évolution à venir dans la danse chinoise. Les GBCM y donneront d'ailleurs des classes de maître.

« Le public et le milieu professionnel chinois veulent comprendre la danse contemporaine, conclut Alain Dancyger. Cela passe par l'échange des savoirs faire.»