En 1999, Louise Lecavalier quittait les rangs de La La La Human Steps, dirigé par Édouard Lock. Depuis, sous l'égide de sa compagnie, Fou Glorieux, fondée en 2006, elle ne cesse d'investir des univers différents, comme ceux des chorégraphes Benoit Lachambre ou Crystal Pite. Mais voilà, la danseuse a eu envie de se réapproprier certains des duos créés pour elle par Lock. Dans A Few Minutes of Lock, elle reprend des duos extraits de 2 (1995) et d'Exaucé/Salt (1998), dansés cette fois avec Elijah Brown. Également au programme, Children, un duo créé pour Lecavalier et Patrick Lamothe par le Britannique Nigel Charnock.

Q - Qu'est-ce qui a déclenché chez vous cette envie de danser à nouveau des pièces d'Édouard Lock?

R - J'en ai envie depuis que j'ai quitté la compagnie! Le matériel d'Édouard est d'une richesse chorégraphique sans fin. Dans les duos que je vais présenter, il n'y a pas une seconde d'improvisation et je ne peux pas faire un geste sans mon partenaire et vice-versa. C'est si complexe techniquement que l'ego n'a plus sa place. C'est très libérateur Je ne pouvais pas faire une croix là-dessus, même si j'ai quitté La La La (Human Steps) parce que je ne voulais plus être dans une compagnie, tourner le même spectacle pendant deux ans...

 

Q - C'est comment, de se retrouver à danser du Lock, après tant d'années?

R - C'est comment entrer dans une peau qui m'appartient complètement. J'ai beaucoup de plaisir. C'est difficile physiquement, mais cette difficulté, je la connais bien. (...) Cela dit, le duo tiré de Exaucé/Salt, je ne l'ai dansé que quelques mois avant de quitter La La La, alors j'avais vraiment tout oublié. Et c'est justement ce qui m'a intriguée. Alors que le duo de 2, je l'avais dans la peau pour l'avoir dansé pendant deux ans. Il m'est revenu très vite.

Q - Est-ce qu'Édouard Lock a participé à cette recréation?

R - Non, ça ne c'est fait qu'entre la répétitrice France Bruyère et moi, qui connaissons très bien le travail d'Édouard, et le danseur Elijah Brown. Édouard ne l'a vu qu'une fois, en studio. Je ne veux pas parler pour lui, mais je pense qu'il a été étonné, d'abord que je puisse encore danser ça et ensuite parce qu'il y avait là du matériel dont il ne se souvenait même plus lui-même tellement il est passé à autre chose après Salt.

Q - Dans les années où vous dansiez avec La La La Human Steps, vous étiez reconnue pour votre corps musclé, presque androgyne. Votre corps a-t-il changé depuis?

R - Mon corps est toujours musclé, mais je suis plus souple. Il faut aussi dire que je travaille maintenant dans plus de registres; je ne fais pas le même genre de mouvements tout le temps comme du temps de La La La, et mon corps gagne à travailler toutes sortes de textures de mouvement différentes. (...) Depuis quatre ou cinq ans, je fais du hata yoga, rien d'excentrique, mais c'est parfait pour moi. Avant, je me surentraînais, par insécurité. Je ne le regrette pas parce que ça m'a donné une force, une détermination et un courage... Mais c'était trop. Maintenant, je n'ai plus besoin de me dépenser autant pour me convaincre que je suis capable de faire un spectacle. (...) En plus, avoir des enfants m'a donné de la perspective : je travaille encore beaucoup, mais vient un moment où je dois arrêter parce qu'il faut aller chercher les enfants à l'école! Je ne peux plus rester éternellement dans le studio.

Q - En fait, les duos d'Édouard Lock ne sont qu'une partie de ce que vous présentez au FTA. Parlez-nous de Children de Nigel Charnock.

R - C'est un feu roulant. C'est très gamin et ça demande beaucoup d'endurance et d'énergie. C'est complètement différent des duos de Lock, dans lesquels il y a toujours quelque chose de contenu, jamais de relâchement complet de la tension. Tandis que la pièce de Nigel n'est qu'une suite d'explosions et de relâchements. C'est très dur sur le coeur. En fait, ça ressemble à une énergie d'enfant, qui joue à quatre pattes, qui se lève, qui court, puis qui recommence...

A Few Minutes of Lock et Children, du 9 au 11 juin à l'Usine C.