Wow. C'est ce que signifie Achusheeling, le titre de la pièce en hébreu, devenu Singular Sensation en anglais. Peu importe la langue, l'essentiel est que la chorégraphe Yasmeen Godder débarque à Montréal avec une pièce sexuelle, dérangeante, tonitruante. Une pièce politiquement incorrecte et brutalement explicite.

La troisième cuvée du Festival TransAmériques permet des découvertes remarquables. Sur le plan international, Yasmeen Godder en est toute une. Cette Israélienne est née à Jérusalem en 1973, a grandi à New York où elle a étudié la danse, d'abord à la High School of the Performing Arts puis à la Tisch School of the Arts au sein de la New York University. Elle y a ajouté une formation poussée à la technique Klein, référence majeure en matière d'improvisation et de performance. En 1999, elle se lance dans la planète danse avec toute sa singularité doublée de la fougue et de l'exigence qui la caractérisent.

Son solo Aleena's Wall triomphe cette année-là au Gvanim Festival de Tel-Aviv. Il est suivi par le duo Tagidi Shalom Yaffe, présenté au Curtain Up Festival, également à Tel-Aviv. De 1999 à 2004, le Curtain Up lui commande chaque année une création, ce qui lui vaut une place sur la liste des jeunes chorégraphes internationales incontournables, que souligne un prestigieux Bessie Award en 2001.

Son retour en Israël correspond à une prise de position politique autant que culturelle, confirmée par la récente installation du Yasmeen Godder Studio à Jaffa, en banlieue de Tel-Aviv.

Retrouver l'énergie brute

Dans le cadre du FTA, elle présente donc Achusheeling/Singular Sensation/Wow, sa plus récente pièce, créée en 2008. La pièce précédente, I Am Mean I Am, créée en 2006, avait été coproduite par Sasha Waltz & Guests. Une coïncidence fait que leurs spectacles se suivent pendant ce festival, mais leur admiration mutuelle, elle, a des fondements profonds : ces deux artistes formées à New York dans les années de la post-modern dance - bien qu'à 10 ans d'intervalle - partagent une vision de la danse comme territoire de l'extrême et du corps comme lien entre l'individu et la masse.

«J'adhère tout à fait à cette notion de combat pour la paix, dit Yasmeen Godder en entrevue. Il y a quelque chose dans la danse et dans les travaux que je mène qui ressemble à un rituel de purification. Sans doute pour trouver «notre paix». Nous devons lutter et nous battre pendant toute l'élaboration d'un spectacle pour atteindre à une certaine sérénité.»

Pourtant, sa pièce semble a priori tout sauf sereine. Achusheelling/Singular Sensation se veut plutôt une quête de notre énergie brute, de nos sensations primaires enfouies sous les couches d'éducation sinon de formatage social. La danse pour quatre interprètes est convulsive, haletante, brutale et explicite, loin des conventions et des démonstrations esthétiques. Je te veux, je te prends, et tant pis pour les frileux!

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Singular Sensation, de Yasmeen Godder, à la Cinquième Salle de la PdA du 21 au 23 mai, 20 h.