C'est toujours un bonheur de retrouver Victor Quijada et Anne Plamondon, le duo du RubberbanDance Group, avec leur gestuelle unique, leurs figures originales qui exaltent l'interaction physique et émotive.

La Phase II de la pièce Punto Ciego, qu'il présente à la Cinquième Salle de la Place des Arts, met en scène deux autres couples, outre le leur - avec Mariusz Ostrowski, Frédéric Tavernini, Lila-Mae G.Talbot et Louise Michel Jackson. Et propose des solos marquants et des scènes de groupe articulées autour de deux canapés à géométrie rectiligne et utilisations variables.

 

Un vrai travail d'orfèvrerie chorégraphique, inspiré et audacieux, sur le thème de la relation à l'autre, aux autres, à soi. Two to tango, pense-t-on: il faut être deux pour être en relation, mais beaucoup plus pour faire une société, même si souvent, au sein de celle-ci, on se sent tout seul. Tout cela nous est dit de manière subtile et touchante, sur un travail d'éclairage remarquable, et une partition musicale, alors là, absolument sublime, qui mêle avec une finesse à donner la chair de poule concertos classiques et techno.

Dans cette Phase II, on retrouve plusieurs éléments de la Phase I, dont les meilleurs restent ceux de Plamondon et Quijada, faits de contorsions inspirées du break et du contemporain, de portés issus du classique et même de mouvements martiaux de la capoeira. Comparé aux autres danseurs, pourtant très bons, leur couple demeure très nettement à part. Ils sont maîtres de ces jeux interrelationnels qui constituent autant de prouesses techniques que de poétique charnelle. Le déséquilibre entre les niveaux d'intensité et d'interprétation d'un couple à l'autre se fait sentir au détour.

En revanche, comme la dernière fois, même si ces parties ont visiblement été resserrées et dynamisées, les éléments de vidéos qui présentent Plamondon et Quijada, ensemble ou séparément, restent les moins convaincants. La thématique des vidéos tourne autour de l'incommunicabilité, de la solitude urbaine et intérieure, et de la responsabilité des médias dans tout ça. Cela souligne la thématique relationnelle globale de la pièce, certes, mais pourquoi doubler le message et faire sortir le spectateur de la bulle sensuelle et émotive dans laquelle le plonge la danse? On continue de s'interroger sur l'opportunité de cette partie vidéo. Et sur la pause, incompréhensible, de cinq minutes juste avant la dernière partie de la pièce.

Malgré ces réserves, Punto Ciego demeure une pièce magnifique, envoûtante et extraordinairement inventive qui témoigne de la maturité de la compagnie.

Punto Ciego, du RubberbandDance Group, les 28 et 31 mars, du 1er au 4 et du 7 au 11 avril, 20h, à la Cinquième salle de la PDA.