Ça y est. Ça se sent, ça se voit. Des planches à la salle, le nouveau Duceppe est arrivé. Les nouveaux directeurs artistiques David Laurin et Jean-Simon Traversy ont fait un excellent choix en lançant la saison avec Oslo, un suspense politique mis en scène énergiquement par Édith Patenaude.

Un couple d'idéalistes, quelque peu naïfs mais déterminés, réussit à faire se rapprocher des ennemis millénaires pour le temps d'une paix. Nous ne sommes pas dans la chaude Vérone, mais à Oslo, ville frigorifiée de Norvège où nos Roméo et Juliette des temps modernes n'auront pas à mourir pour voir Israël et la Palestine conclure les accords historiques de 1993.

Oslo décrit les négociations secrètes qui ont mené à la signature d'une inattendue déclaration de principes entre l'Israélien Yitzhak Rabin et le Palestinien Yasser Arafat. À coups de subterfuges, voire de mensonges, après des mois de revirements, de surprises, d'affrontements et de découragements, le couple d'universitaires norvégiens réussira là où les États-Unis avaient lamentablement échoué.

La pièce de l'Américain J.T. Rogers informe autant qu'elle divertit. Bien construit, le texte démontre que des hommes de bonne volonté à un moment particulier de l'histoire et dans un contexte facilitant peuvent dépasser leur orgueil et les dogmes afin de mettre fin aux différends qui les opposent depuis trop longtemps, causant morts et destruction.

Direction d'acteurs irréprochable

La metteure en scène Édith Patenaude, autre première duceppienne, insuffle à la pièce un dynamisme implacable à l'aide d'une musique jazz omniprésente et d'une occupation experte du grand plateau de Duceppe. Sa direction d'acteurs est également irréprochable. Les personnages sont bien définis et campés par de très bons comédiens, dont beaucoup de nouveaux visages sur la scène de Duceppe.

Le couple norvégien est interprété avec brio par Isabelle Blais et Emmanuel Bilodeau.

Celui-ci arrive à nous tirer une larme à la toute fin après qu'on a eu la bonne idée de décrire le destin des personnages historiques de la pièce en plus des événements tragiques qui ont remis la violence au premier plan depuis 25 ans au Moyen-Orient.

Cette pièce chorale permet aussi aux interprètes de soutien d'avoir, chacun chacune, leur moment d'éclat. Notamment : Marie-France Lambert, qui joue tous les autres personnages féminins, Manuel Tadros en suave négociateur palestinien, Jean-François Casabonne en drolatique Shimon Peres, et Luc Bourgeois, homme à tout faire spectaculaire.

Quelques couacs

Le spectacle n'est pas exempt de défauts. La machine narrative démarre lentement avec un surplus d'informations à transmettre aux spectateurs. Le soir de la première médiatique a été assaisonné de problèmes de micro et de quelques trous de mémoire.

Au-delà de ces considérations, Oslo marque un important grand pas en avant pour une compagnie en pleine mutation. À une autre époque, le fondateur nous avait habitués à la présentation d'un théâtre politique pertinent - pensons seulement à Médium saignant de Françoise Loranger ou encore à Charbonneau et le chef - et Oslo représente, en ce sens, un renouveau fort bienvenu qui ne dénature en rien l'histoire de Duceppe.

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Oslo. Texte de J.T. Rogers, traduit par David Laurin. Mise en scène d'Édith Patenaude. Chez Duceppe, jusqu'au 13 octobre.