Court préambule. Le premier spectacle de Nord Nord Est devait servir de signature à la jeune compagnie menée par Benoît Landry.

Le voyage d'hiver - créé à l'été 2013 avec l'artiste de cirque Anna Ward - se présentait alors comme une succession de tableaux vivants. Du théâtre d'abstraction et de contemplation livré par des acrobates - avec un minimum d'acrobatie. Si l'ensemble (surchargé) manquait de cohérence, les créateurs avaient quand même réussi à créer des tableaux visuellement intéressants.

Avec Une chambre de verre, Benoît Landry marche dans ses propres pas, toujours aussi inspiré par le monde des arts visuels, qu'il mêle ici sans complexe avec la danse et le cirque. Comme dans Le voyage d'hiver, il en ressort des figures et tableaux étonnants, magnifiés par des éclairages subtils (Alexis Bowles) et une musique hypnotique (quoique parfois oppressante).

Mais le théâtre acrobatique de Benoît Landry n'est pas facile à percer. Il faut se laisser porter par ses ambiances tantôt cosmiques, tantôt aquatiques, qui relèvent parfois de l'exercice de style.

Une chambre de verre met en vedette Valérie Doucet, une des performeuses de cirque les plus charismatiques de l'heure. Elle a travaillé avec James Thierrée, Éloize, mais aussi avec la compagnie de cirque australienne Circa, bref, l'acrobate-contorsionniste sait capter l'attention du public. Elle fait équipe ici avec le jeune Julius Bitterling, diplômé de l'École nationale de cirque plus tôt cette année.

Les meilleurs moments de cette Chambre de verre sont d'ailleurs ceux où les deux artistes partagent l'espace de jeu. Dans cet espèce de «vivarium» où ils se donnent la réplique (non verbale), au sol ou dans les airs, mi-humains, mi-animaux. Entrelacés ou suspendus à cette structure de verre, lovés l'un contre l'autre ou en opposition, avec des effets miroirs parfois épatants.

Cette exploration de notre rapport à l'espace (et à notre liberté?) est aussi une carte blanche à Valérie Doucet, qui explore tous les possibles de son champ artistique. Une artiste qu'on regarde toujours avec beaucoup de fascination. 

Comme la contorsionniste Andréane Leclerc, qui s'est intéressée à la dramaturgie de la prouesse (avec sa pièce Cherepaka), Valérie Doucet tente elle aussi de déconstruire le côté spectaculaire de la contorsion et inventer un langage nouveau. Tout ça peut être décontenançant pour le spectateur qui par réflexe cherche à donner un sens à tout ça. En vain.

Malgré une certaine opacité, ce spectacle exploratoire (qui n'est pas un spectacle familial) est aussi l'occasion - pour peu qu'on s'y accorde le droit - de se laisser voguer dans un monde imaginaire qu'on nous invente sous les yeux. Ce qui n'est quand même pas banal, mais qui est assurément plus exigeant. 

Jusqu'au 18 novembre à la TOHU.