Bon texte. Idem pour les acteurs et la mise en scène. Mais résultats mitigés. Qu'est-ce qui cloche dans l'Unité modèle de Guillaume Corbeil?

Le thème est riche. L'échec du matériel peut se décliner de mille et une façons. Dans Unité modèle, Guillaume Corbeil le fait en ironisant sur la vente d'habitations de rêve. 

«Chez Diorama. On fabrique des moments magiques. Des souvenirs inoubliables. Pour que vous viviez vos rêves. Et que vous rêviez votre vie», écrit-il.

Deux représentants vont ainsi, pendant plus d'une heure, tenter de nous vendre leur salade, en énumérant toutes les sortes de bois-bonheur fenêtres-paysages, cuisine-soleil possibles. Ils sont passés maîtres dans l'art de faire croire que le quotidien, c'est le bonheur et la routine, de la magie. 

On n'est pas loin de Noam Chomsky et de son Manufacturing Consent. On ne parle pas de politique ici, mais avec ces deux vendeurs de pacotille, c'est du pareil au même à une époque où absolument tout et son contraire se vendent.

Après une demi-heure de phrases creuses et de bonheur préfabriqué vanté par deux représentants si «humains, si vrais», on a toutefois compris le message. Malgré des gags hilarants, par la suite, l'auteur n'arrive pas tout à fait à éviter les redondances et les brisures dans le rythme. 

Évidemment, cette «présentation» d'unités modèles idylliques, dixit les deux vendeurs, déraillera. La réalité finira par montrer le bout de son nez et ce n'est pas très beau ni très glamour.

Patrice Robitaille et Anne-Élisabeth Bossé jouent habilement sur les fines nuances que nécessite le texte. IIs évoquent le malaise ou carrément le haut-le-coeur d'un contexte de vente sous pression. Mais là aussi, on frôle l'exagération, vers la fin.

La mise en scène de Sylvain Bélanger est énergique et la scénographie, kitsch à souhait, mais on se lasse d'un format contraignant qui laisse peu de place à l'invention et au drame, finalement. 

Pourtant, le sujet et ce qu'il implique sont vastes. La surconsommation, le mensonge du factice et du toc, la vente de rêves désincarnés, la manipulation des émotions, le vide, le vide et le vide...

En voulant confiner l'action et les dialogues à une présentation du type Tupperware avec deux personnages, c'est comme si on avait limité les possibilités d'aller plus loin, de faire exploser ce vide navrant qui est le fait de la société dans laquelle on vit.

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Unité modèle. Texte de Guillaume Corbeil. Mise en scène de Sylvain Bélanger. Présentée au Théâtre d'Aujourd'hui jusqu'au 7 mai.