«Tout le monde a la capacité d'être manipulateur, menteur et haineux», a écrit le dramaturge et réalisateur américain Neil LaBute. Au théâtre comme au cinéma, «l'enfant terrible» invente des personnages qui se présentent sous leur meilleur jour... avant de plonger dans le fossé obscur de l'âme humaine.

Plus connu par ses films (In the Company of Men, Nurse Betty, The Shape of Things), LaBute est aussi une figure importante du théâtre états-unien. Bash est constituée de trois courtes pièces d'environ 40 minutes chacune et réunies en une. Créé «off Broadway» en 1999 (avec entre autres Paul Rudd et Calista Flockhart), le texte est actuellement produit à Montréal dans une mise en scène de Frédérick Moreau. La production met en vedette quatre jeunes comédiens, dont Vincent Côté, qui signe également la traduction. Côté a fondé deux petites compagnies. L'été dernier, il a monté, traduit et joué dans une autre pièce américaine (Oleana de David Mamet). Le jeune homme semble aimer ce théâtre de proximité avec le public, avec des mots qui cognent, et que LaBute, comme Mamet, maîtrise avec efficacité.

Pour Bash, la troupe s'est donné le défi de présenter les courtes pièces dans trois lieux différents, selon la formule du déambulatoire. Les spectateurs sont accueillis par deux comédiens dans le lobby de l'hôtel Zéro 1. À la fin d'une partie, le public est invité à suivre un interprète pour se rendre dans un autre lieu de l'hôtel et même plus loin... Si la formule est sympathique, elle n'ajoute toutefois rien au propos de l'oeuvre.

Le théâtre de LaBute n'est pas léger. Le premier monologue (Iphigénie en Orem), défendu avec fébrilité par Côté, est le récit d'un homme d'affaires mormon, coincé et rationnel, qui tente d'expliquer l'inexplicable. Le deuxième (Medea redux) est un interrogatoire d'une femme qui, à 14 ans, a eu une liaison amoureuse avec son professeur de biologie (le titre vous donne une bonne idée du drame qui surviendra). Martine-Marie Lalande incarne cette femme dépossédée d'elle-même. Finalement, le spectacle se termine avec un monologue à deux voix entrecroisées qui expose la face cachée de l'homophobie d'une jeunesse dorée et conservatrice (un couple de jeunes mormons). Guillaume Perreault et Fanny Migneault-Lecavalier jouent avec conviction ce couple diabolique à l'image parfaite qui va déraper le soir d'une réception dans un chic hôtel new-yorkais.

Bash est donc une belle initiative de ces jeunes interprètes qui n'ont pas peur de proposer du théâtre autrement. Il ne leur manque que du public... Le soir de notre passage, on comptait huit spectateurs!

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Bash, les dimanches et lundis à 20 h jusqu'au 17 juin. Point de départ: lobby de l'hôtel Zéro 1 (1, boulevard René-Lévesque Est).