Sans surprise, l'humoriste Billy Tellier a remporté haut la main son pari de faire de son premier spectacle solo une belle réussite artistique, dix ans après être sorti de l'École nationale de l'humour.

Sans surprise, car on savait qu'avec tout le bagage d'expérience qu'il a accumulé depuis 2002, autant avec ses apparitions sur scène et à la télé que grâce à ses émissions radiophoniques, il avait le talent requis pour mettre le public dans sa poche.

Et c'est ce qu'il a fait avec brio lors de sa première médiatique montréalaise, mercredi soir au Théâtre St-Denis, qui a confirmé - s'il était besoin - qu'il a non seulement un vrai sens du comique mais aussi une plume, une plume originale et bien affutée qui nous permet d'apprécier sa performance comme celle d'un comédien. Ah, ce bonheur qu'est l'humour quand le texte est là, évocateur et nourrissant!

Comme pour tous les premiers spectacles solos, Billy Tellier s'est d'abord présenté, évoquant sa naissance difficile de fragile prématuré et sa croissance dans la vie qui a fixé le crayon de plomb sur le mur à 5 pieds 3 pouces, «la taille d'un pénis d'éléphant en érection», a dit l'humoriste trentenaire.

Il ne faut pas prendre cette citation comme représentative de la soirée. Billy Tellier ne fait pas dans la vulgarité ou l'insignifiance. C'est là sa force. Sans être un humoriste qui fait pleurer de rire toutes les deux minutes, il fait plaisir avec ses jeux de mots. Il intéresse avec ses associations d'idées. Il se glisse même parfois dans les atours de la poésie avec ses «papillons qui butinent mon coeur pour tapisser d'arc-en-ciel mes journées grises».

Il captive surtout quand il explique qu'on devrait apprendre aux jeunes que dans la vie «tout n'est pas parfait» ou quand il essaie de définir ce qu'est un homme, lui qui estime ne pas être tout à fait comme les autres hommes, expliquant, qu'avec sa taille, il est «plus une proie qu'un prédateur» et que c'est l'humour qui l'a sauvé.

Sa réflexion sur la virilité est intéressante. Il apporte, en riant, sa contribution sur ce qu'est devenu l'homme dans la société québécoise d'aujourd'hui, une définition heureusement bien plus large que ce qu'elle était auparavant.

Son numéro durant lequel il raconte le baptême de son filleul, alors qu'il chuchote sans cesse dans l'oreille de sa blonde, demeurera un classique non pas seulement d'humour mais d'exercice théâtral. Il faut le voir interagir avec sa copine, avec sa voisine ou avec le jeune turbulent assis derrière lui. On voit la scène. On devine les personnages.

Billy Tellier a une grande qualité d'expression et de gestuelle qui le conduira certainement à jouer la comédie dans d'autres circonstances.

La mise en scène de Christian Viau (galas Juste pour rire, Les Olivier, Eddy King) est agréable et efficace. Les jeux de lumière combinés aux décors de Jean-Marc Saumier sont plaisants à l'oeil, jamais agressifs et mettent bien l'artiste en évidence.

Expressif, Billy Tellier bouge bien sur scène, sautille comme un lutin, grimpe sur le décor pour se donner de la hauteur et de la prestance afin de jouer un «petit Napoléon» qui veut commander et changer le monde. Imposer la loi du plus fort.

Mais la force a aussi a changé, nous fait-il comprendre. Il termine sa performance avec une anecdote sur un enfant malade, Nicolas, qui a voulu le voir à Sainte-Justine, pour partager un moment de plaisir avec lui. Une anecdote en guise de pensée. «Des fois, la force c'est de sourire», a-t-il glissé. Un grand bonhomme, ce Billy Tellier.

_________________________________________________________________________

La loi du plus fort, de Billy Tellier. Ce vendredi et samedi, à 20h, au Théâtre St-Denis. Supplémentaires les 17 et 18 mai.