Le projet de déménagement des 7 doigts de la main dans l'ancien Musée Juste pour rire est très avancé, a appris La Presse. Une étude détaillée, financée en partie par la Ville de Montréal, évalue à environ 13 millions le coût de la transformation du bâtiment en Centre de création et de production.

Mais le temps presse pour la troupe de cirque québécoise, qui connaît une forte croissance. Son studio de répétition, situé dans un édifice de l'École de cirque de Verdun, sera transformé en Maison de la culture en 2012. Ce qui l'oblige à se trouver un nouveau toit.

Heureuse coïncidence puisque la Société d'habitation et de développement de Montréal (SHDM), qui a racheté l'immeuble du boulevard Saint-Laurent du Groupe Juste pour rire le 6 septembre (pour la somme symbolique de 1$), n'a pas l'intention de demeurer propriétaire longtemps.

«Les coûts de détention sont élevés, on parle d'environ un demi-million de dollars par année», précise Carl Bond, directeur de la gestion immobilière. Des frais de fonctionnement que les 7 doigts se disent capables d'assumer seuls. La SHDM pourrait-elle vendre l'immeuble à un utilisateur «non culturel» ? «Oui, répond Carl Bond. Si les négociations perdurent, ça pourrait changer.»

La troupe de cirque, qui fêtera ses 10 ans l'an prochain, a entamé il y a quelques mois des discussions avec la SHDM. Elle estime que le Musée est parfaitement adaptable à ses besoins. D'autres sites potentiels ont été identifiés par la troupe, dont la TOHU et l'École de cirque de Verdun, mais ils ont été écartés pour le moment.

«Nous avons plusieurs nouveaux projets sur les rails: notre nouvelle création prévue pour l'été prochain, la formation d'une nouvelle équipe de Traces pour l'Europe, la reprise de PSY à Ottawa en juin, etc. Nous avons absolument besoin d'un lieu de répétition où nous pourrons regrouper toutes nos activités», explique Nassib El Husseini, directeur général des 7 doigts.

Le plan de la compagnie comprend l'aménagement d'un grand studio de création, de deux studios d'entraînement et d'une salle de danse dans l'édifice de sept étages. Le Cabaret du Musée Juste pour rire serait maintenu dans son état actuel et continuerait de présenter des spectacles. Le Groupe Juste pour rire continuerait d'occuper le bâtiment adjacent.

La SHDM favorable

La SHDM affirme vouloir conserver la vocation culturelle de cette ancienne brasserie (Ekers) élevée en 1894, mais pas à n'importe quel prix.

Carl Bond, a confirmé à La Presse que la Ville de Montréal et la SHDM étaient toutes deux à la recherche d'un «utilisateur culturel». M. Bond affirme que son organisme est favorable au projet des 7 doigts de la main, mais qu'elle attend «la confirmation d'un engagement financier» de sa part.

La SHDM n'a pas voulu spécifier le prix de vente de l'immeuble. «Nous attendons d'abord de recevoir une proposition» a-t-il dit, en ajoutant que d'autres groupes culturels auraient manifesté leur intérêt. Il a toutefois indiqué que la valeur de l'édifice est estimée à 3,1 millions. Une somme qui correspond à une partie de la dette du Groupe Juste pour rire qu'elle a épongée en 1997.

«Nous ne pouvons céder l'immeuble aux 7 doigts gratuitement», dit M. Bond. On pourrait signer avec eux un bail à long terme sur une période de 30 ans (comme nous l'avons fait avec Éloize pour la gare Dalhousie), mais avec une rente annuelle qui pourrait être de 100 000$.» Les 7 doigts, eux, se disent prêts à négocier cette rente.

Montréal et Québec

De son côté, la Ville de Montréal dit «miser» sur les 7 doigts de la main, le partenaire le plus «crédible» jusqu'à présent, selon Philippe Rousseau, responsable des relations avec les médias.

«On aimerait que ce projet se concrétise, mais rien n'est conclu. Les discussions vont se poursuivre dans les prochains mois», a-t-il laissé tomber. La Ville de Montréal a refusé de révéler combien elle était prête à investir dans le projet.

La porte-parole du ministère de la Culture, Annie LeGruiec, n'a pas voulu commenter le projet des 7 doigts, ni préciser la contribution financière du gouvernement. «On souhaite que ce bâtiment conserve sa vocation culturelle. Mais notre rôle est d'accompagner les organismes admissibles au programme d'aide aux immobilisations, qui prévoit une subvention pouvant allant jusqu'à 90% du projet.»

Dans le cas de la gare Dalhousie, la SHDM a cédé le bâtiment au Cirque Éloize pour une durée de 30 ans en échange d'une rente de 1$. «Une transaction qui n'a eu aucun impact financier sur la SHDM», indique M. Bond. En échange, le Cirque Éloize s'est engagé à faire des travaux d'amélioration de 4 millions au cours des deux premières années. Le ministère de la Culture pourrait financer plus des deux tiers du coût des travaux grâce à son programme d'aide aux immobilisations.