L'artiste de cirque chinoise Yan Yan Zhao avait coproduit Jungua, présenté il y a quatre ans à la TOHU. Cette fois encore, elle réunit sur scène des acrobates chinoises et des diplômés de l'École des moines de Shaolin, mais dans une nouvelle création qu'elle a mise en scène avec l'aide d'un des artisans de la première heure du Cirque du Soleil, son ami Guy Caron.

Ils se sont connus en 1986, au Festival mondial du cirque de demain, à Paris. Elle s'était démarquée avec un numéro de bicyclette qu'elle présentait avec son frère. Lui était membre du jury. L'année suivante, elle a été recrutée par le Cirque du Soleil pour la tournée de son spectacle Le Cirque réinventé. Depuis, elle a émigré aux États-Unis, alors que lui, après une fructueuse carrière au Cirque du Soleil et à l'École nationale de cirque (qu'il a fondée), multiplie aujourd'hui les projets en Chine.

Si Yan Yan Zhao a fait appel à Guy Caron pour Chi of Shaolin, c'est pour l'aider à raconter une histoire. «Je voulais aller plus loin que Jungua, nous dit-elle de sa résidence de Reno, dans le Nevada. Je ne voulais pas d'une succession de numéros acrobatiques. Je voulais qu'il y ait une histoire. Et, surtout, de l'émotion.»

C'est ce que s'est échiné à faire Guy Caron, à partir des fragments d'un récit imaginé par la metteure en scène chinoise. «J'ai tenté d'intégrer toutes les techniques chinoises d'acrobatie, d'arts martiaux et de maniements d'armes dans un scénario», explique le directeur artistique, qui réside une partie de l'année dans l'île espagnole de Majorque.

Ce n'est pas la première fois que des diplômés de l'École des moines de Shaolin se retrouvent sur la même scène que des acrobates chinois. Mais ces spectacles axés sur la performance et les prouesses techniques manquent parfois d'humanité ou de sensibilité. «La première fois que j'ai vu un spectacle pareil, c'était en 1986, se rappelle Guy Caron, qui était le et du trio de clowns Chatouille et Chocolat. Guy Laliberté nous avait dit: Je vous emmène voir des scènes de combat. Mais dans un spectacle de cirque, il faut donner un sens à ces combats.»

L'histoire est celle d'un jeune délinquant qui vole une oeuvre d'art avant de se faire tabasser par le propriétaire dudit objet qui le laisse pour mort. Un moine passant par là le ramène en forêt, dans le monastère de sa communauté. C'est là qu'il sera soigné et qu'il profitera des enseignements des moines. Mais aussi de leur entraînement.

Il en ressortira, bien sûr, complètement transformé. Physiquement et spirituellement. Les moines lui transmettent le «chi», c'est-à-dire l'énergie positive. Ils vont même jusqu'à le faire léviter!

À sa sortie du monastère, il croisera sur sa route plusieurs bandits. Mais il saura leur donner ce qu'il a reçu comme enseignement. Un scénario plutôt simple, qui a tout de même le mérite de lier tous les numéros au programme.

«C'est un spectacle où il y a un très haut niveau d'acrobatie et de performance. En plus des interprètes issus de l'École des moines de Shaolin, qui font du chi kong, il y a des maîtres de kung-fu encore plus spectaculaires, dont le champion junior de Chine, qui défend le rôle principal, détaille Guy Caron, qui a été le premier directeur artistique du Cirque du Soleil en 1984. Et qui a signé la mise en scène d'importantes productions comme Dralion (1999) et (2004, avec Robert Lepage).

Créé en 2010 à Pékin, Chi of Shaolin a depuis été présenté aux États-Unis et a reçu partout des critiques élogieuses. Sur scène, nous pourrons voir les cinq acrobates chinoises de l'Imperial Acrobats of China, en même temps que les 8 jeunes hommes férus d'arts martiaux, pour un total de 13 artistes. Pour se préparer à la mise en scène de ce premier spectacle, elle dit avoir vu plusieurs films d'art martial, dont le célèbre Tigre et dragon, d'Ang Lee.

«Il a fallu construire un univers et puis des personnages forts. Guy m'a beaucoup aidée à lier l'histoire aux numéros acrobatiques. Ça n'a pas été facile», indique Yan Yan Zhao, issue de quatre générations d'acrobates, qui se consacre aujourd'hui à la direction de sa compagnie MPY International. «J'ai commencé à l'âge de 6 ans. C'est mon père qui m'a appris à faire de la bicyclette acrobatique, confie-t-elle. Mon grand-père a même appris au dernier empereur de Chine, Pu Yi, à faire du vélo!»

De son côté, Guy Caron a mis en scène un autre spectacle de cirque, The Magical Music Box, dans une petite salle de Pékin. La pièce, interprétée par la troupe d'acrobates de Pékin, raconte l'histoire d'une jeune fille qui réalise son rêve de devenir acrobate. Comme pour Chi of Shaolin, il s'agit d'une fusion entre le cirque contemporain et les arts traditionnels chinois. «J'aime le mélange des genres, comme avec l'opéra chinois, qui intègre des numéros de cirque, dit-il. C'est un beau défi de lier ces disciplines artistiques.»

Chi of Shaolin, à la TOHU du 27 septembre au 6 octobre.