Rendons à Duran ce qui revient à Duran: ces gars-là ont décidé qu'ils passeraient le reste de leur vie professionnelle à remercier ceux qui les ont grassement fait vivre pendant presque 20 ans. Deux heures de concert, 13 succès à la douzaine, et voilà plusieurs centaines d'heureux trentenaires confits dans la nostalgie de leurs années boutonneuses.

Mercredi soir dernier, Duran Duran, vestige de la scène pop new wave britannique des années 80, auteurs d'une bonne vingtaine de succès qui ont défini cette époque où le cheveu défiait les lois de la physique, ont fait salle comble au Métropolis alors qu'ils auraient pu tout autant en attirer le triple au Centre Bell, n'eut été de la légende Tina Turner qui, elle aussi, divertissait ses nostalgiques, d'une autre époque.

 

Attendus avec un enthousiasme certain, la bande à Le Bon (Simon) a pourtant débuté sa performance de façon pour le moins cahoteuse avec The Valley, la chanson qui ouvre Red Carpet Massacre, leur plus récent album lancé il y a un an et qui justifiait la tournée mondiale que le groupe a mené avant de faire escale à Montréal.

Or, de nouvelles chansons, nous n'avions que bien peu à cirer, pour être franc. Et depuis longtemps d'ailleurs. Depuis le milieu des années 90 que les albums des hérauts eighties sont d'un très mince intérêt. Pour ajouter à ce début de concert claudiquant, le son, atroce, qui ne permettait d'entendre clairement que la voix de Simon Le Bon (pas très juste, il lui fallut quelques minutes de réchauffement) et le jeu du guitariste Dom Brown qui remplace Andy Taylor depuis quelques années.

Dès la deuxième chanson, les fans recevaient leur dû: Planet Earth, premier succès du groupe - 1981, ça ne rajeunissait personne, encore moins en constatant que certains avaient même amené leurs enfants au concert! La suivante a remis le groupe sur le bon chemin, le son dans son équilibre, et les fans dans leurs souvenirs: Hungry Like The Wolf, le hit gros comme ça, balancé en début de concert, pas de doute, la soirée était déjà gagnée d'avance.

Hormis les quelques intermèdes que furent les chansons du nouvel album, toute la soirée a été passée à se rappeler tel ou tel refrain qui hante encore notre mémoire. On a beau dire, on a beau voir un Simon Le Bon joufflu et pas tellement dégourdi, ses confrères Nick Rhodes (clavier), John (basse) et Roger Taylor (batterie) réinterpréter de la manière la plus fidèle possible les vieux hits tels qu'on se les remémorait, la conclusion était fatale: Dieu que ce groupe-là en a pondu, des succès!

Allez: «No-No-No» Notorious, entonnée en choeur. Plus électro, I Don't Want Your Love (1988, pas mal meilleure dans nos souvenirs que live au Métropolis), la ballade Save a Prayer bruyamment accueillie par la foule, le A View to a Kill (chanson du film de James Bond du même nom) ...

Généreux, Duran Duran. Trop, peut-être - aucun discernement dans l'enfilade de succès, les pires comme les meilleurs. Les meilleurs: Serious, Is There Something I Should Know, l'immense The Reflex - allez, tous ensemble: «Whaaaaaaaaaa don't you use it?» -, (Reach Up For the) Sunrise et Wild Boys en toute fin, avant le rappel.

Les pires? La reprise de White Lines, tiens, succès original de Grandmaster Flash que Duran Duran avait listé sur Thank You, un album particulièrement atroce constitué de reprises. On pourrait même croire que le monde a arrêté de s'attarder au groupe lors de la parution de ce navet, en 1995. Or, voilà le groupe qui, tout de même, lance un nouvel album aux trois ans, prétexte à revisiter son répertoire et ses millions de fans. Belle soirée, pleine de souvenirs et de sourires embarrassés. Thank You aussi, Duran.