Quel beau week-end, quelles conditions parfaites pour flâner d'une scène à l'autre! Et dire que c'est déjà terminé Le 29e Festival de jazz a connu une fin beaucoup moins humide que ses débuts il y a déjà 10 jours, alors que la pluie menaçait même l'hommage à Leonard Cohen, heureusement épargné. Hier soir, c'était vraiment l'été, et un peu aussi l'Afrique. Merci au rocker griot Mory Kanté, magnétique sur la grande scène.

Qu'importe s'ils devaient se lever tôt ce matin pour aller travailler, les festivaliers ont répondu en masse au dernier grand rendez-vous du Festival de jazz, présidé par le Guinéen Mory Kanté et son orchestre d'une douzaine de musiciens - section de cuivres, trois choristes, balafon, djembé, plus la kora ou la guitare de la star elle-même.

Kanté, qu'on n'avait pas vu à Montréal depuis quelques années, est encore aujourd'hui reconnu pour son succès international Yéké Yéké, paru en 1988 et ressuscité cinq ou six ans plus tard par le duo allemand Hardfloor, qui l'avait efficacement moulé aux pistes de danse des after-hours.

La tournée qui le ramène sur nos scènes vise justement à célébrer les 20 ans de cette célèbre chanson et à parcourir sa discographie en 90 minutes. «Il vient un moment où il faut faire un bilan de sa vie, nous a expliqué Kanté en début de concert. Je crois que mon bilan est positif!»

D'autant plus que, à l'approche de la soixantaine, Mory Kanté est toujours un incroyable performeur, guitariste et koriste de talent et chanteur déchaîné. Il a du soul, cet homme! Dans son élégant complet blanc, Mory Kanté a mené la fête avec une énergie du tonnerre, dirigeant son orchestre à travers son répertoire afro-funk et pop-rock éminemment contagieux.

Ouvrant le bal avec Bankiero (de N'Dirabi, 1993), Kanté et son orchestre ont assuré les spectateurs qu'ils ne resteraient pas là sans bouger. Hormis quelques morceaux plus calmes (la touchante Alamina Badoubaden, en hommage à son grand-père, lancée à la mi-concert), la soirée a pris des airs de discothèque africaine, appuyée par les Courougnegne, Nafiya et Biriya (de son plus récent album, Sabou, lancé en 2004) et, bien sûr, Yéké Yéké. Impossible de résister à telle proposition!

En première partie, les Montréalais ont pu apprécier la découverte de l'heure au Québec: le trio The Lost Fingers, qui a passé les derniers jours au pavillon Heineken à offrir ses relectures "swing gitan" des tubes des années 80. Les cinq chansons présentées hier soir donnaient un aperçu trop bref du talent de ces trois musiciens pour qu'on se prononce en définitive.

Du lot, la version de Billie Jean de Michael Jackson était, de loin, la plus réussie. Avec son intro joliment bricolée, ses arrangements vocaux dynamiques et quelques passages de guitares bien envoyés, nous avions presque l'impression que la démarche du trio n'était pas qu'un simple exercice de style, impression que nous avions gardée après l'écoute de l'album (déjà disque d'or!). Il faudra voir si la farce est assez bonne pour durer mais, d'ici là, il faut reconnaître que ces gars-là ont le tour de nous accrocher, et leur expérience au Festival de jazz leur a été bénéfique.