L'affaire a commencé il y a six ans dans un bar du boulevard des Forges. Le claviériste et arrangeur Stéphane Milot avait eu l'idée, et le producteur Stéphane Boileau a rassemblé des musiciens et chanteurs de la Mauricie pour cette revue des grands succès des 40 dernières années.

Le Maquisart, qui ne dérougissait pas, est vite devenu trop étroit. De l'autre côté de la rue, le détail n'a pas échappé à Claude Marchand, le patron de la salle J.-Antonio Thompson, une des plus belles du Québec. Showtime a traversé, et la revue a été présentée plus de 100 fois à la J.A.T. depuis trois ans. La semaine dernière, La Presse a assisté à la première de la quatrième saison.

Grosse mécanique, Showtime. Huilée, ronflante ou pétaradante, comme les bolides rétro qui se rassemblent dans le parc portuaire de Trois-Rivières, le mercredi soir. Les sept musiciens, les cinq chanteurs, les créateurs et les techniciens ont avantage à ne pas souffrir de somnolence, car dès le numéro d'ouverture - une gigue un peu déroutante au su de ce qui suit - Showtime atteint sa vitesse de croisière: le pied dans le tapis.

D'emblée, le spectateur est saisi par la cohésion orchestrale et la précision rythmique de l'ensemble dirigé, au clin d'oeil, par Stéphane Milot (qui collabore notamment aux arrangements de Madonna). Comme on dit dans le métier, ça rentre! Quatuor rythmique lourd - piano-batterie-percu-basse: c'est là que ça se passe. Trompette coupante, saxo qui prend la guitare au besoin. Et Sylvain Sauvageau, guitariste top-niveau et showman extraordinaire: montrez-moi-z-en un meilleur

Les solistes sont au niveau du band, allumés, énergiques sans se prendre pour des G.O.

Du talent, du métier

Dès qu'elle apparaît en Lady Alys Roby pour Tico tico - Showtime met en scène des personnifications et non des imitations «pareil-pareil» -, on voit que Mary-Pier Guilbeault a du talent et du métier, et qu'elle ne va pas s'enfarger dans les fleurs du tapis du grand escalier dans Chanson pour Elvis de Diane Dufresne, en intro à vous savez qui...

Le King lui-même, oh! yeah! qu'incarne André Veilleux, un Monsieur Perfo grimaçant, aussi à l'aise dans le smoking blanc de Dean Martin (That's amore) que botté dans l'affreux jumpsuit de Michel Fugain. Oui, Showtime, «c'est la fête» à laquelle se joint Joanie Goyette, une recrue black qui, à son tout premier solo, a su gagner le R.E.S.P.E.C.T. de tous.

Une affaire de réglée depuis longtemps pour François Cossette, mains agiles à la guitare et voix haut perchée (excellent dans le pot-pourri des Beatles), comme son frère Sylvain (à qui il se joint parfois pour la tournée «70's», le hit musical de l'heure au Québec). Famille de talent, les Cossette de Grand-Mère.

Et voilà l'élégante Marilyn Berthiaume, une spécialiste du répertoire disco (Summer, Gaynor) qui, en finale après les U2, Genesis et tout, fait lever la foule avec Love Can Move Mountains, de Céline Dion. L'amour n'aura pas le temps de transporter les montagnes, car la chanson s'arrêtera après deux couplets. Double ouache!

Humour et musique

Showtime aurait avantage à se resserrer - pas besoin de 110 chansons - et à laisser quelques pièces se développer jusqu'à la jouissance finale du spectateur. Ça dure déjà trois heures? Ma suggestion toute personnelle serait alors de couper aussi, et beaucoup, dans les «liens» de cet Alex Hentrix (jeu de noms!), un personnage dont l'humour verbo-historique, qui veut nous «faire réfléchir», se marie mal avec la musique.

Rien dans tout ça pour vous empêcher de prendre la 40 et, sur le chemin de Québec, arrêter quelques heures dans le delta du Saint-Maurice. Trois-Rivières, la grande timide, a beaucoup à offrir. Depuis 1634.

Showtime, les jeudis, vendredis et samedis, 20h, jusqu'au 13 septembre à la salle J.-Antonio Thompson, à Trois-Rivières.