Si, au hasard d'une promenade à la Grande Bibliothèque, on vous invite à pénétrer dans une étrange petite cabane, ne rebroussez pas chemin. Les 21, 22 et 23 août, AbracadaVra! Le grand vivant invite le grand public à prendre part à un «super cadavre exquis» qui sera ensuite transformé en performance protéiforme dont vous êtes le héros!

Qui sont les individus qui font la somme d'une masse? Qu'est-ce que chacun d'eux a à exprimer? À créer?

Voilà le genre de question que l'acteur français Laurent Shuh s'est posé avant de proposer le projet AbracadaVra! Le grand vivant, spectacle protéiforme de la compagnie française Les arts mouvants, créé pour la première fois à l'occasion des 30 ans du Centre Pompidou.

«D'une part, je voulais affirmer qu'un territoire délimité, un espace public, était porteur d'un imaginaire collectif. Comme si on mettait une caméra au-dessus de ce genre d'endroit et qu'on sentait les bonnes et mauvaises vibrations ou le langage qui y planaient», m'explique le concepteur du projet dans le jardin de la Grande Bibliothèque.

Pendant trois jours, donc, les abonnés de la Grande Bibliothèque seront invités à laisser leur contribution au cadavre exquis. Après leur séjour dans «l'isoloir», on filmera leur bouche lisant leur phrase. Ils seront également invités à contribuer à la conception d'un grand manteau fait de coupures de journaux.

À partir de ce matériel, un spectacle en plusieurs volets sera dévoilé dans un premier temps à la Grande Bibliothèque, puis à la Place des Arts.

«La mise en espace débutera par une performance orale et musicale qui va révéler le contenu de cette phrase «géantissime.» Par ce travail, nous allons chercher à sculpter en direct, de manière improvisée, de façon à créer une dynamique entre le parler et le chanter, à faire vibrer les mots. En deuxième lieu, il y aura une projection des bouches qui disent exactement le même texte», explique

Laurent Shuh, qui lira la somme des phrases contenues dans un long parchemin. Ce dernier travaillera en collaboration avec des artistes français et les Québécois Jean Derome (à la musique) et Alyson Wishnousky (aux chorégraphies).

Les moutures précédentes d'AbracadaVra! Le grand vivant - l'expérience a été répétée dans plusieurs festivals européens - ont révélé que la démultiplication des sens s'y avérait souvent très drôle. «En matière de contenu, on remarque que des vases communicants s'installent entre les phrases des gens. De vraies histoires s'y racontent, ainsi que des témoignages d'ordre politique ou sur notre rapport au monde.»

Le rapport à la planète, poursuit Laurent Shuh, est une préoccupation prédominante dans les phrases cueillies par les expériences précédentes d'AbracadaVra! Le grand vivant.

«Le projet est articulé sur la question de l'intime, dans son rapport collectif. Comment notre inscription construit-elle un univers collectif et, surtout, comment tenons-nous compte de cette vision collective?»

Sous le nombre, la masse, les statistiques, on oublie qu'il y a des vivants, des individus qui pensent, qui ressentent et qui s'expriment seuls et en simultané, nous rappellent Les arts mouvants. Comme un grand cadavre exquis...

AbracadaVra! Le grand vivant