Pour les férus de chanson, les FrancoFolies, comme le festival Coup de Coeur francophone d'ailleurs, sont l'occasion rêvée pour enfin voir ces artistes français qui fréquentent peu (oupas) les scènes nord-américaines. Ainsi, il était grand temps qu'on invite Benjamin Biolay, auteur-compositeur particulièrement doué, l'un des plus brillants de sa génération, à venir nous chanter la pomme. Ce qu'il a fait, hier soir, au Club Soda. D'entrée de jeu, il faut bien dire que la performance offerte par Biolay et ses deux musiciens était beaucoup plus satisfaisante que celle que nous avons attrapée il y a une dizaine de jours, aux FrancoFolies de Spa, en Belgique.

Question de lieu, tout bêtement : Biolay n'est pas taillé pour les scènes extérieures. Le personnage, comme son oeuvre, s'apprécie mieux dans les endroits sombres.

Un spectacle plus modeste permet de goûter à fond ses nuances et ses teintes de gris.

Sans être mémorable, le premier concert de Benjamin Biolay sur une scène montréalaise a offert plusieurs moments savoureux de chanson à la fois abrasive, moderne et suave.

Biolay n'est pas une bête de scène et ne le sera probablement jamais. Il n'a pas une grande voix, quoique ce soit d'une importance relative. Le trentenaire ne fait que chanter ses chansons belles et touchantes et, lorsque les conditions sont idéales, c'est bien assez pour nous faire passer une belle soirée.

Cependant, la proposition scénique était plutôt mince: un guitariste, un homme à tout faire (piano, clavier, section rythmique synthétique) et la star, qui joue tantôt de la guitare, tantôt du piano, tantôt de la trompette.

Le manque de main-d'oeuvre se faisait surtout sentir dans les compositions plus rock, comme Rendez-vous qui sait (tirée de son plus récent album, Trash Yéyé), laquelle aurait été mieux servie par un vrai batteur et un vrai bassiste.

Ailleurs, les arrangements synthétiques embrumaient parfaitement la voix brute de Biolay (Tant le ciel était sombre), qui est à son mieux lorsqu'il est seul au piano ou à la guitare acoustique, accompagné par une guitare électrique - sa version de Jardin d'hiver, composée pour Henri Salvador, a ravi le public, tout comme Billy Bob a raison, qui suivait.

Déplacé lorsqu'il gesticulait trop, Biolay était toutefois sincère et cinglant (il a profité de la chanson Laisse aboyer les chiens pour décocher un trait à l'endroit de Michel Fugain). Deux fois plutôt qu'une, il a dit combien il était content de participer à nos FrancoFolies.

En première partie, le public a pu découvrir Béatrice Martin, auteure-compositrice interprète qui s'est fait connaître par les amateurs de nouvelle musique sous le pseudonyme Coeur de pirate. Dix-huit ans seulement et déjà une voix, à défaut d'avoir une plume vraiment originale. Une voix singulière et bouleversante, cachée dans cette petite femme maladroite sur scène, qui a terminé son concert en disant: «Ben c'est ça. Merci beaucoup!» L'album est attendu cet automne; on s'en reparle.