Depuis quelques années, Guy Nantel a pris l'habitude de proposer des numéros qui attirent des «Ohhhh!» et des «Ahhhh!» sur la scène du Théâtre Saint-Denis et le plateau de l'émission Il va y avoir du sport, à Télé-Québec. Dans le cadre du 26e festival Juste pour rire, l'humoriste accommodant anime son premier gala en carrière. Un gala raisonnable avec des invités qui ont de vraies affaires à dire.

Vingt ans sur scène à pratiquer un humour social, à souligner au marqueur les aberrations du quotidien, souvent en privilégiant le deuxième degré... Guy Nantel en a vu de toutes les couleurs.

Les débris des deux tours du World Trade Center fumaient encore quand il a décidé de proposer un numéro sur les attentats du 11 septembre. «Je me faisais huer partout où je le présentais, se rappelle-t-il. Je critiquais le peuple américain. Je m'étonnais de leur étonnement quant aux attaques dans leur pays. Puis, avec le même numéro, j'ai eu une ovation deux ans plus tard, lors d'un gala Juste pour rire.»

Sans les attaques du 11 septembre 2001, les Québécois seraient un peu moins ouverts d'esprit, estime Guy Nantel. Les événements n'ont pas fait seulement converger la population vers les bulletins d'information. Ils auraient, par la bande, fait apprécier davantage l'humour de Guy Nantel.

«Depuis 2001, les Québécois sont plus ouverts à l'autre», juge celui qui a néanmoins reçu son lot d'insultes et de courriels haineux après certaines prestations à la défunte émission de débats Il va y avoir du sport (diffusée pendant trois ans à Télé-Québec).

«Les gens ne comprennent pas toujours ce que je fais, affirme Nantel. Plusieurs pensent que je suis raciste alors que j'ai voyagé dans 50 pays et que j'ai gagné le prix d'ouverture sur le monde de la Course autour du monde, en 1994. D'un autre côté, j'ai croisé des Africains qui m'ont remercié de créer un espace de nuances. Ils me disent qu'il y a plein d'extrémistes qui parlent en leur nom. Ultimement, le fond de mon propos, c'est l'amour de l'autre et le souci d'égalité.»

Guy Nantel, donc, persiste et signe: «C'est le plus grand plaisir au monde d'être sur scène et de provoquer des réactions qui ne sont pas linéaires, puis de rallier finalement les gens à toi, confie-t-il. C'est là-dedans que je suis le mieux.»

Alors que les recommandations du rapport Bouchard-Taylor font encore jaser, Guy Nantel propose, ce soir, au Théâtre Saint-Denis, Le gala raisonnable. «C'est le moment ou jamais d'aborder le sujet», dit-il. POur ce gala, il sera épaulé par Jean-François Mercier, Maxim Martin, Sylvain Larocque, Anthony Kavanagh, Rachid Badouri et d'autres humoristes aux origines diverses.

Nantel planche sur cette soirée depuis des mois. «On s'y est pris pas mal à l'avance. Ça demande beaucoup d'énergie. Certains animateurs enregistrent une sitcom en même temps qu'ils préparent un gala. Moi, c'est mon projet prioritaire. Du début à la fin, le gala se tient. Et je serai sur scène pendant 40 minutes en tout.»

Pour alléger sa tâche, la direction de Juste pour rire a proposé à Guy Nantel de travailler avec le metteur en scène Joël Legendre. «Sur le coup, j'ai hésité. Pour moi, Joël Legendre, c'était un gars sympathique, mais qui animait Occupation double! Puis, je l'ai appelé et, en 10 secondes, tout a changé. Joël est patient, généreux et respectueux. Il ne cherche pas à imposer ses idées. J'avais besoin de quelqu'un qui ait confiance en ce que je fais. J'avais peur que des gens de théâtre dénaturent ce que je suis.»

Guy Nantel parle en connaissance de cause. Par le passé, l'humoriste de 39 ans, qui aime bien travailler en solitaire, a manqué de faire le clown sur scène. «On m'a déjà suggéré de porter des collants sur scène! raconte-t-il. J'ai la chance de faire ce métier depuis longtemps. En 20 ans, j'ai essayé tout ce que je suis incapable de faire: chanter, danser et imiter! Avec le temps, j'ai ramené mon humour à sa plus simple expression: parler derrière un micro. Même le micro-casque et les déplacements sur scène ne me conviennent pas.»

Ça ne l'a pas empêché de grimper, lentement mais sûrement, dans l'échelle québécoise de la notoriété. Juste pour rire l'estime désormais assez connu pour lui confier l'animation d'un gala, au plus grand plaisir du principal intéressé. «Animer un gala Juste pour rire, c'est le top pour un humoriste. Il n'y a que deux autres choses qui égalent ça: faire un Bye Bye et gagner un Olivier.»

Le gala raisonnable de Guy Nantel, ce soir, à 19h30, au Théâtre Saint-Denis.