Qu'importe qu'il soit invité aux FrancoFolies ou au Festival de jazz, c'est avec un plaisir renouvelé qu'on accueillera le guitariste, réalisateur et auteur-compositeur-interprète français Rodolphe Burger, de retour dans la sphère jazz avec son complice Yves Dormoy, saxophoniste-bidouilleur. Avec un peu de chance, il nous glissera quelques chansons du brillant No Sport, paru au printemps.

En vérité, pour les intimes et intrigantes chansons de No Sport, il faudra plutôt attendre à l'automne prochain, laisse entendre Burger. Réalisé avec son complice Doctor L, ce nouvel album de l'ancien leader du groupe Kat Onoma est une affaire beaucoup plus terre-à-terre, sur le plan des textures sonores, que les envolées électroniques qui l'inspiraient il y a quelques années et qui sont encore le principal matériau du projet Planetarium.

«No Sport n'est pas un disque rétro ou vintage, dit Burger. Nous avons essayé au contraire d'être très contemporains, sans user des recettes faciles ou des machines. C'est un disque très acoustique», très blues aussi, planant malgré tout, la voix du chanteur étant elle-même une invitation à la contemplation.

Burger, depuis ses débuts avec le groupe rock d'avant-garde Kat Onoma (1980-2002), repousse les frontières qui séparent le rock au jazz à grandes doses d'expérimentations, une quête qui se poursuit encore ce soir au Studio du Monument-National.

«C'est un projet en évolution», explique Burger, qui prend une pause de sa tournée française en appui à No Sport pour renouer avec l'électro-jazz du projet Planetarium.

«Yves Dormoy est un musicien avec qui je jouais à mes tout débuts à Strasbourg. Il était partenaire de ces expériences musicales qui ont mené à la création de Kat Onoma. Mais lui a toujours été animé d'un esprit plus jazz, il est très intéressé aux musiques improvisées, proche d'une démarche à l'image de celle d'un Ornette Coleman. On s'est retrouvés autour de ce projet. L'approche électronique de la musique a réactivé quelque chose chez lui»

Le public jazzophile aura l'occasion de mesurer l'évolution du projet Planetarium puisque Burger et Dormoy l'avaient présenté au Festival en 2004, un an seulement après sa création. Cinq ans plus tard, le projet ne cesse d'évoluer.

Depuis le dernier concert de Kat Onoma en 2002, Burger n'a pas chômé. Réalisation d'albums, ceux, exquis, de Françoise Hardy (Parenthèses), de Jeanne Balibar (Paramour, l'impeccable Slalom Dame), de Jacques Higelin (Amor Doloroso), collaborations avec Bashung, avec le poète Pierre Alféri, puis, sur No Sport, avec Rachid Taha et James Blood Ulmer.

Reste le regret de n'avoir jamais eu l'occasion d'amener ses amis de Kat Onoma pour donner un concert à Montréal, où le groupe n'a eu qu'une petite fenêtre de visibilité lors de la parution de l'album Far From the Pictures.

«Il y a eu plusieurs occasions ratées, et je crois qu'il y avait un certain obstacle avec la langue, puisqu'on chantait majoritairement en anglais. Si nous étions trop avant-gardistes pour notre époque? Je commence à le penser, oui. Mais paradoxalement, aujourd'hui, j'ai l'impression que l'audience du groupe augmente. Je sens que de plus en plus de jeunes s'intéressent à ce qu'on fait. J'ai l'impression que la proposition de Kat Onoma fonctionne mieux aujourd'hui que dans les années 80, où elle était totalement en porte à faux, en tout cas auprès du public français.»