Devant la journaliste, Patrick Bourgeois, François Jean et Alain Lapointe sont surexcités. «On se sent transportés, lance Jean. On n'a pas planifié ça.» Ça? Le retour des B.B. sur scène, à Montréal. Le temps de deux spectacles extérieurs d'une heure, ce soir, aux FrancoFolies.

Le temps de chanter les accrocheuses Loulou, Donne-moi ma chance, Parfums du passé, Fais attention, T'es dans la lune, Tu ne sauras jamais, Snob et Seul au combat qui les ont rendus populaires à la toute fin des années 80. Des succès qui leur ont fait vendre des centaines de milliers d'albums, qui ont fait d'eux de grands vainqueurs au gala de l'Adisq, les ont fait jouer au Zénith de Paris en première partie de Patrick Bruel et aux FrancoFolies de La Rochelle notamment.

Depuis la séparation du groupe en 1996, ses membres ont pris leurs distances, se sont retrouvés le temps de quelques spectacles et de l'enregistrement d'un album en 2004, mais sans plus. En entrevue, à la veille de leur «premières» Franco de Montréal, ils jubilent, mais restent zen. «On n'a pas à défendre un album, cette fois, note Patrick Bourgeois. On ne se prend pas au sérieux. On n'a rien à prouver.»

C'est la voix de la maturité qui s'exprime... «On a près de 150 ans à trois aujourd'hui», mentionne Bourgeois, 45 ans. Sur scène, ils comptent s'amuser comme des petits fous. Jouer la nostalgie, par plaisir, en compagnie d'un bassiste (Denis Béland) et de deux choristes, sans penser à ce qui pourrait les attendre en groupe demain.

«On fait tous autre chose, dit Bourgeois, qui compose de la musique de pub depuis des années. Mais si la réception est bonne, on verra! Cela dit, on ne fait pas ces shows dans le but de renaître. Il ne faut rien forcer.»

Les années ont passé, ont pansé les plaies. Les mauvais souvenirs sont derrière eux. En entrevue, les gars sont ouverts. S'il y a de la rancune, ils la masquent très bien, derrière des sourires et des blagues. «Je me rappelle que Claude Rajotte, à l'époque où il travaillait à MusiquePlus, a lancé mon album solo dans les toilettes! raconte Bourgeois, en riant. Et j'avais travaillé tellement fort sur celui-ci (Inexploré), avec Aldo Nova notamment.»

Le chanteur et guitariste relate du même souffle sa brève expérience à la barre du quiz radio-canadien Fa Si La Chanter, en 1996. «La partie rebelle de ma vie! lance-t-il. J'ai revu l'émission l'autre jour. Oh boy! Maudit Youtube! C'était un beau défi payant. Mais c'est comme si Jim Morrison était allé animer The Price Is Right

Avant que ses années de consommation soient derrière lui, François Jean a vécu l'enfer. «J'ai eu bien des problèmes, rappelle le batteur. À l'époque, je cassais la chandelle en deux et je brûlais les morceaux par les quatre bouts! Je suis un survivor. Je ne sais pas combien de thérapies j'ai faites de 1990 à 2000. Ce n'est pas facile quand tu es sur les drogues dures depuis l'âge de 13 ans.»

La dissolution des B.B. a, sur le coup, apporté plus de peines que de joies à ses membres. «Avec un ego démesuré, j'ai lancé un album solo (Moi) qui s'est vendu à 8000 exemplaires. J'ai fait des clubs de blues. Je me sentais comme un joueur du Canadien qui retourne à Hamilton», détaille François Jean.

Alain Lapointe a, de son côté, momentanément noyé sa peine dans un magasin de musique «à 8 $ de l'heure, se rappelle le claviériste, aujourd'hui professeur de musique pour des enfants en difficulté d'apprentissage. On a vécu un syndrome post-olympique après la séparation des B.B. Dans mon cas, mes années au sein du groupe ont hypothéqué ce que je faisais avant. J'étais claviériste pour des Pagliaro notamment. Quand je suis retourné sur le marché, je n'étais plus connu comme un claviériste professionnel et les places étaient prises.»

Cela dit, il ne sera aucunement question des jours sombres, ce soir, sur scène. Plutôt radieux, comme leurs vidéoclips de l'époque. Le plus gros souci du trio aujourd'hui: «On a monté deux heures de show. Il faut réduire à 60 minutes», dit Jean. On a déjà vu pire!

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LES B.B. à L'espace Ford, angle Sainte-Catherine et Jeanne-Mance, ce soir, à 21 h et 23 h.