Parmi les grandes réussites montréalaises des dernières années, il faut compter l'aménagement du Quartier des spectacles dans sa partie ouest, c'est-à-dire autour de la Place des Arts.

Comme les publicités de certains traitements miracles pour le visage ou le corps, les photos «avant» et «après» sont saisissantes: avant, la rue Jeanne-Mance avec ce parking immonde sur la butte Balmoral; après, la place des Festivals, cet espace qui, pour «fixer» les grands festivals au centre-ville, a servi de déclencheur au vaste projet. Le reste est à l'avenant.

Le Quartier des spectacles, toutefois - un nom propre donné à un secteur qui a toujours été cela: un quartier de spectacles -, n'est pas le produit d'un miracle mais d'une action concertée des trois ordres de gouvernement sur une vision commune. Et un problème urgent: la revitalisation du centre-ville de Montréal.

«Cohésion remarquable», disait Denis Coderre mardi à la conférence de presse convoquée par la Ville, le Partenariat du Quartier des spectacles (PQS) et la Chambre de commerce du Montréal métropolitain (CCMM) pour dévoiler les résultats d'une étude sur les retombées économiques immobilières du QdS dans le pôle Place des Arts, retombées que le Groupe Altus a évaluées à 1,5 milliard de dollars.

En vrac: depuis la mise sur pied du PQS en 2007, un milliard de dollars a été investi dans 48 projets immobiliers dont la moitié sont des complexes résidentiels et six sont reliés à des organismes culturels comptant pour 25% de la valeur totale: la Maison symphonique, la Maison du Festival Rio Tinto Alcan, le 2-22 et la Société des arts technologiques sur Saint-Laurent, l'Espace Georges-Émile Lapalme de la Place des Arts, et l'édifice Wilder de la rue De Bleury, en train de se transformer en Espace Danse.

L'autre tiers des retombées vient de surplus de taxation de l'ordre de 530 millions, dont 148 millions ont déjà été récoltés via la TPS, la TVQ et les taxes foncière et scolaire.

Pendant que Jacques Primeau, président du conseil d'administration du PQS, souligne «l'effet de levier remarquable» du Quartier des spectacles, Michel Leblanc, président de la Chambre de commerce, se réjouit de la confiance que le projet a inspirée au secteur privé, responsables de plus de 70% des investissements immobiliers dans le secteur. L'aménagement du QdS a coûté 150 millions, les retombées dépassent le milliard: Michel Leblanc aime le ratio...

M. Leblanc, contrairement à beaucoup qui ne prononcent plus son nom, a eu le courage de souligner l'apport historique de l'ex-maire Gérald Tremblay, premier élu à partager les idées des «visionnaires culturels», alors menés par Alain Simard, fondateur de trois des grands festivals montréalais et infatigable promoteur du centre-ville.

Voyant dans ce succès une autre preuve que «Montréal est une grande métropole culturelle», le maire Coderre a donné quelques indications sur la suite des choses. Après des années de valse-hésitation, le projet de patinoire-stationnement dans l'îlot Clark (au nord de la rue Sainte-Catherine) devrait se mettre en marche «avant le printemps». Bien hâte de voir la maquette de cette «oeuvre architecturale» qui doit s'insérer dans un plan de stationnement du centre-ville où, selon le maire, il manque 1400 places.

Coquin, le maire a aussi précisé être en pourparlers avec le maire de l'arrondissement de Ville-Marie, nul autre que lui-même, pour l'adoption d'un Programme particulier d'urbanisme pour le Quartier latin, PPU qui, déployé dans sa partie est, constituera la phase 2 de l'aménagement du Quartier des spectacles. De Saint-Laurent vers l'est jusqu'à Saint-Hubert dans un secteur qui inclut des lieux culturels de qualité tels la Grande Bibliothèque, l'UQAM, le Théâtre St-Denis et, sur De Maisonneuve, la Cinémathèque et le Centre Pierre-Péladeau.

D'ici là, à l'ouest, l'îlot Place des Arts aura profité de l'agrandissement du Musée d'art contemporain, de la rénovation du Wilder et, juste au nord, de la construction d'un édifice où logera l'Office national du film à compter de 2017.

L'importance de l'offre

Entre-temps, toutefois, le Quartier des spectacles et ses partenaires doivent se pencher sur la situation de ces lieux qui sont à l'origine même de sa création: les salles de spectacles. Au nombre de 30, elles sont publiques, privées ou appartiennent à des OSBL, et affichent une offre qui va des grands classiques de la musique et du théâtre aux créations les plus éclatées du multimédia moderne.

Depuis quelques années, l'assistance annuelle des salles du QdS s'est stabilisée autour de 1,5 million de spectateurs. Progression zéro... Pourquoi? À cause, sûrement, de la concurrence des salles de banlieue, en humour surtout, dont certaines sont à la fine pointe du confort et de la technique. Avec plein de parking à 100 pieds de la marquise.

Reste que le manque de stationnement, ou la perception d'un tel manque, n'est pas la seule cause du piétinement des salles du centre-ville. Les gens de la Table des salles du Partenariat du Quartier des spectacles sont à explorer la problématique qui doit inclure l'offre elle-même.

De Varennes ou de Rosemont, les gens ne descendent pas en ville pour voir le Quartier des spectacles, mais bien pour voir les spectacles ou les oeuvres qui y sont présentés. Pendant que le béton sèche, il faut d'emblée se concentrer sur cet aspect de la question.