La moitié des spectacles du jour annulés: l'appel national à la grève de la CGT Spectacle et la Coordination des intermittents, samedi, a de nouveau surtout affecté le Festival d'Avignon, devenu la caisse de résonance du mouvement.

Au moins six spectacles sur les treize prévus ce samedi au Festival d'Avignon dans le cadre du «In», le festival officiel, ont été annulés et le doute subsistait pour les autres, dont l'emblématique Le Prince de Hombourg qui avait été annulé en ouverture le 4 juillet, indiquait dans l'après-midi la direction du festival.

Le directeur du festival Olivier Py a annoncé à la mi-journée que 5 spectacles étaient maintenus, mais le doute s'instaurait au fil de l'après-midi, chaque équipe décidant de la grève à l'arrivée sur le spectacle.

Le personnel du festival s'était prononcé vendredi à 65% en faveur de la grève, mais la participation au scrutin n'avait pas dépassé 46%, et c'est spectacle par spectacle que les salariés se prononçaient ce samedi.

«Je ne pense pas que la grève soit une bonne stratégie, c'est plutôt une tragédie», a regretté Olivier Py, indiquant que les annulations de spectacles le 4 juillet puis ce samedi ont déjà engendré des pertes atteignant 138 500 euros pour le Festival d'Avignon.

Parmi les spectacles emblématiques annulés figure le Mahabharata de Satoshi Miyagi. Les interprètes japonais «considérant que jouer est un acte sacré ont décidé de donner des extraits devant le Petit Palais (près du Palais des papes) gratuitement», a dit le responsable du festival.

Plusieurs milliers de personnes, artistes et techniciens du spectacle, mais aussi employeurs (Syndeac) ont par ailleurs défilé dans l'après-midi de la Gare d'Avignon au centre de la ville, devenue le bastion de la lutte des intermittents.

Les intermittents protestent contre la nouvelle convention d'assurance-chômage qui durcit les conditions d'indemnisation des professionnels du spectacle, en rallongeant le délai de carence entre la fin des périodes travaillées et le versement des allocations.

Filippetti à Avignon

Le spectre d'une annulation en chaîne des grands festivals, comme lors du précédent grand conflit des intermittents en 2003, s'est éloigné avec le vote des personnels pour leur maintien, ponctué de journées d'actions.

Aux Francofolies de La Rochelle, où leur présence est très discrète depuis l'ouverture jeudi, les intermittents devaient défiler en silence sur le port à 18h00, puis prendre la parole avant le concert des Innocents.

À Arles, où la plupart des intermittents ont quitté les lieux après les accrochages des expositions de photographie, la situation était calme et aucune action particulière n'était prévue. Il n'y avait pas de perturbation annoncée aux Nuits de Fourvière comme à Jazz à Vienne.

À Paris, une vingtaine de manifestants se sont retrouvés devant la Comédie française pour une action «symbolique».

L'agitation s'est éteinte à Montpellier avec la fin du Printemps des comédiens, où pratiquement aucun spectacle n'a pu jouer, et de Montpellier Danse. La 34e édition de Montpellier Danse, qui s'est close le 9 juillet, a finalement pu donner 38 représentations sur 48, tandis que le petit festival Uzès Danse était annulé, et le Festival de Marseille très touché.

À Avignon, la contestation s'exprime aussi dans le Off, rassemblement de 1083 compagnies en marge du festival officiel, mais les troupes, qui louent les salles très chères, ne peuvent se permettre pour la plupart de faire grève.

Depuis le début de la mobilisation des intermittents, le premier ministre, Manuel Valls, a multiplié les gestes pour tenter de déminer le conflit, annonçant une concertation sur l'intermittence puis la sanctuarisation des crédits du ministère de la Culture (hors communication) pour les trois ans à venir.

Interrogé sur la venue programmée de la ministre de la Culture Aurélie Filippetti à Avignon, mercredi et jeudi, Olivier Py a souligné ne pas avoir connaissance qu'elle assisterait à un spectacle. En début de festival, le collectif des salariés du festival avait souligné que les «membres du gouvernement étaient persona non grata» au festival: «les spectacles n'auront pas lieu en leur présence».